Mon attention a été attirée par la carte blanche de l’Association belge francophone de science politique (ABSP), publiée dans le Soir le 22 janvier 2021, qui regrettait la décision de lui couper les subsides et de réserver l’octroi de subventions aux associations scientifiques ou de diffusion des connaissances répondant notamment aux deux critères suivants : l’objectif majeur doit être la communication sur le rôle des sciences et techniques dans le monde d’aujourd’hui et/ou l’attractivité des études dans le domaine des STEM (Science, Technology, Engineering & Mathematics) et le fait qu’il ne doit pas être réservé à un public de spécialistes.
Certes, je salue la volonté de la Ministre de l’Enseignement supérieur, Valérie Glatigny, d’élaborer de nouveaux critères ayant pour objectif de pouvoir opérer une sélection qui soit à la fois objective et équitable, ainsi que l’intention du gouvernement de revaloriser les STEM et l’image des filières et des métiers techniques et manuels. Je partage également l’idée qu’il faut encourager les jeunes femmes à s’intéresser aux STEM.
Cependant, je partage les craintes exprimées par l’ABSP : il semble en effet que des associations qui se consacrent aux sciences humaines et sociales, telles que la sienne, ne pourront plus prétendre à ces financements.
Or, si les STEM ont un rôle primordial à jouer pour faire face aux défis majeurs auxquels notre société sera confrontée à l’avenir, il ne faut pas sous-estimer le rôle des sciences humaines et sociales à cet égard : elles permettent de penser de manière critique les aspects sociaux, politiques, culturels et éthiques de ces défis et des solutions qui leurs sont apportées.
L’ABSP et les organisations similaires permettent à la recherche en sciences humaines et sociales de rester vivace, en finançant la publication d’ouvrages, en soutenant les jeunes chercheurs pour qu’ils puissent participer à des colloques de niveau international et en offrant aux chercheurs un lieu de rencontre et d’échanges.
Grâces à elles, les chercheurs peuvent éprouver leurs analyses, en renforcer la robustesse, pour ensuite en faire part à la société. De telles organisations sont cruciales également dans la mesure où elles permettent un contrôle de scientificité par les pairs, de construire des réseaux de recherche au-delà des concurrences institutionnelles et de développer des synergies à travers la mise en œuvre de projets de recherche partagés.
Les STEM seront donc revalorisées, comme il est prévu dans la DPG, et je m’en réjouis. Mais quelles dispositions seront prises pour soutenir les associations dédiées aux autres sciences, et leur permettre de soutenir à leur tour leurs chercheurs ? Leurs subsides ont-ils été supprimés et si oui pour quelles raisons ?
Par ailleurs, dans la carte blanche, la création d’un groupe de travail est évoquée pour opérer la sélection des demandes de subventions. Quelle en sera sa composition et son mode de fonctionnement ?
Enfin, de quelle manière, en pratique, les jeunes femmes seront-elles encouragées à choisir de se diriger vers les STEM ?
Dans sa réponse, la Ministre clarifie une série de points tout en rappelant son intérêt, eu égard à son propre parcours académique, pour les sciences humaines. Elle indique notamment que “l’objectif est de pouvoir estimer les besoins et de définir de critère équitables afin d’opérer une sélection qui permette d’éviter une dispersion des crédits et un effet de saupoudrage.”
De mon côté, je trouve qu’il est judicieux de valoriser les STEM, comme le prévoit la DPC. J’attire l’attention de la Ministre sur le fait qu’il faut veiller à ce que les nouveaux critères n’excluent pas d’autres types de sciences, comme les sciences humains qui restent fondamentales dans une société qui a besoin de valoriser le sens, l’analyse et la critique. Ce ne serait pas non plus le sens de la DPC, qui dit qu’il faut valoriser les STEM, mais pas nécessairement au détriment d’autres sciences. Il faut trouver cet équilibre.
Il sera important d’être vigilant sur le choix des critères, et on y sera évidemment attentif.