La décision des communes de Bastogne et de Bertogne de fusionner après les élections communales de 2024 a fait grand bruit ces dernières semaines. Et c’est précisément dans ce contexte que le Gouvernement wallon vient d’adopter les dernières mesures d’exécution permettant de mettre en œuvre le décret organisant la fusion des communes. On ne peut que se réjouir de l’avancée de cet important dossier pour nos villes et communes, en particulier dans le contexte de difficultés financières qu’elles connaissent.
On voit d’ailleurs qu’après l’annonce de Bastogne et Bertogne, il semblerait que plusieurs autres communes wallonnes seraient enclines à suivre la même voie.
Dès lors, j’ai souhaité approfondir la question suite à l’adoption de ces nouvelles dispositions par le Gouvernement.
D’où ces questions au Ministre des Pouvoirs locaux, Christophe Collignon :
- Monsieur le Ministre, dans quelles mesures les dispositions prises permettent-elles de rencontrer réellement les besoins des communes qui souhaitent fusionner ? Quelles initiatives avez-vous prises pour engendrer un réel intérêt de leur part et pour assurer un véritable accompagnement dans ce processus de fusion ?
- La question des grades légaux constituait notamment l’un des points qui restait à préciser. Quels sont les choix posés en la matière et comment sont-ils justifiés ?
- En outre, les conseils communaux ont désormais jusqu’au 31 octobre 2022 pour soumettre leur demande du fusion au Gouvernement. Pourquoi avoir choisi ce délai ? Qu’en est-il des communes qui décideraient de fusionner après ? Devront-elles attendre l’échéance des élections 2030 ? En effet, lors de la commission du 21 décembre 2021, vous nous informiez que le plan Oxygène comporte une extension du mécanisme jusqu’aux élections 2030, cela a-t-il été confirmé ?
- Finalement, vous mettez à disposition des communes une enveloppe de 100 millions d’euros au total, selon un montant de 500€ par habitant, avec un plafond de 20 millions par entité fusionnée. Quelles dispositions avez-vous prises en cas d’attrait soudain plus fort que prévu pour le dispositif, qui viendrait à engendrer un dépassement du montant alloué ? Avez-vous par ailleurs bien prévu un incitant pour les fusions intervenant également au-delà de 2030 ?
Réponse du Ministre :
“Le Gouvernement a adopté en première lecture, c’est-à-dire le 17 février dernier, les dernières dispositions décrétales et les mesures d’exécution qui permettent la fusion des communes. Pour encadrer sa mise en œuvre,certaines dispositions du Code de la démocratie locale et de la décentralisation et de la loi organique des CPAS devaient être clarifiées et précisées. Il s’agissait essentiellement de fixer la liste des annexes à joindre à la proposition commune de fusion, d’établir le modèle d’inventaire, d’arrêter les modalités d’octroi du bonus financier, de consacrer la procédure de désignation du directeur général et du directeur financier de la nouvelle entité.
C’est une étape très importante dans une réflexion d’ensemble qui vise à définir la taille critique d’une commune, qui garantisse sa viabilité et sa pérennité.Cela s’inscrit dans ma volonté d’optimiser les ressources des pouvoirs locaux en mutualisant les moyens, en recherchant les économies d’échelle, que ce soit par des rapprochements de structures locales ou en développant la supracommunalité via l’appel à projets en cours.
Le décret étant désormais opérationnel, les communes vont pouvoir déposer une candidature de fusion sur base volontaire en vue du renouvellement des conseils communaux pour les élections du 13 octobre 2024. Les conseils communaux actuels adopteront en ce sens une proposition conjointe de fusion qu’ils soumettront au Gouvernement wallon au plus tard le 31 octobre 2022, soit la date fixée par le décret initial du 2 mai 2019. Cette proposition reprendra les données cadastrales attestant des limites de la nouvelle commune et le nom proposé de la nouvelle entité.
Une phase d’inventaire est nécessaire pour énumérer,classer et le cas échéant, interpréter une série d’éléments permettant de connaître la situation réelle des communes candidates. Le Gouvernement décidera au plus tard le 31décembre prochain s’il présente la proposition de fusion au Parlement qui sera amené à se prononcer fin mars 2023.
Les incitants financiers sont prévus. Une enveloppe de 100millions d’euros est dégagée sur la période2025-2030. L’aide doit permettre une reprise des dettes des entités à hauteur de 500euros maximum par habitant avec un plafond de 20millions par entité fusionnée. Je vous renvoie à cet effet aux articles L1158/6 et L1158/8 du Code de la démocratie locale.
Si ce dispositif devait susciter un engouement conduisant à dépasser le budget global dégagé, le Gouvernement prendra les mesures nécessaires, mais honnêtement, je serais fort surpris, bien que je ne demande pas mieux.
Le même mécanisme de bonus est prévu pour les élections 2030, exception faite du montant total de l’enveloppe qui sera déterminé par le Gouvernement après l’évaluation de la première vague de fusions à intervenir à la suite des élections 2024. Comme vous vous en doutez, nous avons ancré ce bonus sur les scrutins communaux dans un but de simplicité, pour éviter de modifier les structures en cours de législature avec les complexités juridiques et pratiques que cela entraînerait. Notre approche est donc globale. Notre volonté est bien de favoriser les fusions, mais aussi les synergies et la notion de supracommunalité à laquelle vous savez que je suis fort attaché.
Les derniers arbitrages en matière de grades légaux ont donc été réalisés lors de la première lecture,notamment par la mise en œuvre d’un mécanisme de préséance dans le processus de désignation. Certaines dispositions des décrets fusion de 2019 relatives aux grades légaux étaient en effet sujettes à interprétation, faisant peser un risque d’insécurité juridique sur le dispositif. Pour pallier cela et encadrer la mise en œuvre de la fusion, certaines clarifications et précisions ont été apportées, mais nous y reviendrons très prochainement lors du débat que nous aurons au sein de cette commission.
Un vade-mecum réalisé par le SPW IAS en collaboration avec l’Union des villes et communes sera bientôt mis à la disposition des communes. Il est conçu comme un guide avec des fiches thématiques visant à accompagner les entités intéressées dans toutes les étapes du processus.
Pour le reste, mes services se tiendront bien entendu à la disposition des communes souhaitant être conseillées dans cette importante opération.”
Je suis aussi agréablement surpris du succès potentiel de ce type d’initiative quand on entend les déclarations d’intérêt dans toute une série de communes, principalement dans certaines régions du pays comme la province du Luxembourg.
On verra comment cela se concrétise dans les faits, mais c’est une donne qu’il ne faut pas négliger, notamment au vu de la situation des finances locales. C’est un réel enjeu pour de nombreuses communes.
D’autres façons de faire des économies sont toutefois possibles. Il y a toute la question des synergies qui sont importantes au-delà de la question des fusions et c’est un autre enjeu sur lequel il faut pouvoir travailler. D’autant que, et c’est une des dimensions de l’équation, le délai pour se prononcer sur une éventuelle fusion est assez court aussi pour les communes, d’ici le 31 octobre 2022. Il faudra donc mettre en place les conditions pour les y encourager. En cela, le vade-mecum sera particulièrement utile. Mais il faudra aussi travailler dans la perspective de 2030 et mettre en place les solutions pour accompagner les communes qui souhaiteraient se lancer dans cette perspective de 2030.