Pour pouvoir étudier en Belgique, un étudiant étranger non-européen doit démontrer qu’il dispose de revenus suffisants. Pour cela, il peut faire appel à un garant. Or, depuis ce 1er janvier, le montant de revenus mensuels nets dont doit disposer une personne pour pouvoir assurer cette fonction de garant vient d’être porté à 2699 €. En outre, une nouvelle condition vient d’être ajoutée : il faut désormais que l’étudiant présente un lien de parenté jusqu’au 3è degré avec le garant.
Suite à ces nouvelles conditions, la situation est aujourd’hui dramatique pour de nombreux étudiants, principalement africains, qui n’ont tout simplement pas pu renouveler leur inscription pour cette année académique.
Pire, un certain nombre d’entre eux se tourneraient, pour essayer de trouver une solution leur permettant de poursuivre leurs études malgré tout, vers des personnes mal intentionnées qui profitent de leur situation de faiblesse pour signer de fausses attestations de prise en charge dans des conditions obscures. Des dizaines d’étudiants seraient ainsi concernés, avec un risque de se voir expulser, et de voir leur parcours scolaire s’arrêter net.
Ces nouvelles conditions financières et administratives posent donc de réelles difficultés, dans une situation où les étudiants étrangers vivent déjà dans des conditions particulièrement précaires.
D’où ces questions à la Ministre de l’Enseignement supérieur :
- Quel regard portez-vous sur le durcissement de ces conditions ? Etes-vous informée des difficultés rencontrées par les étudiants étrangers concernés ? Quelles mesures sont prises pour les aider à faire face à cette situation ? Un dialogue est-il engagé avec les autorités fédérales pour tenter de trouver une solution ?
- Par ailleurs, les associations s’occupant des étudiants étrangers dénoncent la durée particulièrement longue de traitement des dossiers de renouvellement des titres de séjour dans le cadre des études (plus de deux mois, sans aucune certitude que le visa soit renouvelé). L’impact sur les études, mais aussi sur la santé mentale et la précarité des étudiants est évident. Avez-vous dès lors des contacts avec vos collègues du Gouvernement fédéral pour tenter d’améliorer les choses en la matière ?
Réponse de la Ministre :
“Monsieur le Député, votre question porte sur des sujets dont je suis bien consciente, mais qui concernent en réalité des compétences de la secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration, Nicole De Moor, au niveau fédéral. Il conviendrait donc de la lui adresser. Un dialogue est néanmoins engagé depuis longtemps sur le sujet avec les autorités compétentes au niveau fédéral. Ce dialogue a pu être facilité par mes soins.
L’Académie de recherche et d’enseignement supérieur (ARES) suit de près les récentes évolutions législatives qui découlent directement et indirectement de la transposition de la directive (UE) 2016/801 du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2016 relative aux conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers à des fins de recherche, d’études, de formation, de volontariat et de programmes d’échange d’élèves ou de projets éducatifs et de travail au pair. En effet, l’ARES joue un rôle proactif dans ce domaine, en accompagnant les établissements dans ces changements législatifs, en faisant part des problèmes à l’Office des étrangers et en assurant une coordination entre les établissements à ce sujet. Elle organise par ailleurs des séances d’information annuelles en collaboration avec l’Office des étrangers afin que les établissements puissent s’approprier les changements législatifs et en informer les personnes concernées.
S’il existe de réelles avancées dans ces nouvelles réglementations, des problèmes liés à des délais de procédure ou certaines lourdeurs administratives ont été signalés par les établissements. J’ai ainsi proposé de faciliter une réunion au mois de juin dernier entre l’ARES, des représentants d’établissements, le cabinet de l’ancien secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration et l’Office des étrangers pour que les problèmes rencontrés par les étudiants puissent y être discutés. Plusieurs pistes de travail en sont ressorties, notamment celle d’un processus d’évaluation conjointe entre l’Office des étrangers et l’ARES sur les récents changements réglementaires qui peuvent avoir une incidence sur les étudiants étrangers qui souhaitent étudier dans les établissements de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Cette évaluation devrait voir le jour dans les mois qui viennent. J’y resterai attentive et continuerai à jouer un rôle de relai entre l’ARES et les autorités compétentes à ce sujet si le besoin s’en fait sentir.”
Il est clair que la compétence est principalement fédérale. D’autres collègues sont actifs à ce sujet au niveau fédéral. Cependant, en Fédération Wallonie-Bruxelles, nous avons aussi un rôle de relai et de levier pour susciter le dialogue. Je ne peux que saluer les démarches déjà réalisées. En effet, cette situation pousse de nombreux étudiants dans une extrême difficulté et aggrave leur précarité.
Dans la résolution interparlementaire de lutte contre la précarité étudiante figure une recommandation spécifique sur la situation des étudiants étrangers pour améliorer leurs conditions d’accès à l’enseignement supérieur de manière globale. Sont évoquées, parmi l’ensemble des dispositions, la question des garants et la nécessité de renforcer le dialogue avec le niveau de pouvoir fédéral à ce sujet. La situation s’est encore aggravée ces dernières semaines. Je constate qu’une évaluation est en cours et m’en réjouis. J’espère que nous pourrons jouer ce rôle de relai pour essayer d’améliorer la situation de tous ces étudiants. Je compte sur la Ministre pour maintenir la pression sur le pouvoir fédéral.