L’Union des Villes et Communes de Wallonie organisait récemment une journée d’étude consacrée aux enjeux de la supracommunalité en Wallonie.
On sait qu’il s’agit d’un outil sur lequel les acteurs locaux misent beaucoup dans le contexte de difficultés financières qui les frappe actuellement. Elles permettent de mutualiser des ressources et des compétences, de réaliser des économies d’échelles, de mener à bien des projets de plus grande ampleur, ou encore d’éviter des concurrences inutiles.
Dans les faits, ces initiatives supracommunales peuvent prendre toute une série de formes différentes et on sait qu’elles sont confrontées à plusieurs enjeux importants en termes de contrôle démocratique, de légitimité, voire de lisibilité pour les citoyens et les élus.
Le Ministre des Pouvoirs locaux a commandé une étude sur le sujet au Professeur Grandjean afin de faire le point sur le phénomène. Celui-ci évoque deux pistes principales : un modèle comparable aux communautés urbaines françaises via un véritable transfert de compétences et un encadrement juridique des initiatives existantes.
Le Ministre a marqué sa préférence pour cette seconde option.
L’étude constate toutefois, à l’heure actuelle, un certain chevauchement des initiatives existantes avec les provinces. L’UVCW plaide elle aussi pour une rationalisation des structures.
D’où ces questions :
- Quelles leçons tirez-vous de cette journée d’étude organisée par l’UVCW et de l’étude du Professeur Grandjean ?
- Comment intégrez-vous dans votre projet la conciliation des enjeux de renforcement des dynamiques supracommunales, de contrôle démocratique et de simplification du paysage institutionnel réclamée par les acteurs ?
Réponse du Ministre :
“Monsieur le Député, c’est un vaste débat pour une dernière interpellation en notre commission et en cette journée qui fut dense, mais ayant l’occasion de se voir régulièrement ici ou ailleurs, on pourra en discourir dans d’autres circonstances. Simplement, pour faire le lien, nous avons eu à traiter d’une application du projet « Fusion de communes », qui ne semble pas recueillir l’unanimité sur tous les bancs. Par contre, il y a la difficulté globale de faire vivre les communes demain, ce pour quoi la supracommunalité reste une piste intéressante. Vous allez très loin dans le débat : quel est le bassin ? Cela engendre-t-il des suppressions de niveau de pouvoir ? N’y a-t-il pas un risque de déplacement de pouvoir si ces structures ne sont pas composées d’élus directs ? Tout cela est très affiné, ce qui ne sera pas compatible avec l’agenda de fin de législature. J’essaye d’être pragmatique et de répondre aux besoins des communes pour leur donner des outils, non pas dans cinq ans, mais de la manière la plus rapprochée. C’est pourquoi on a d’abord lancé l’appel à projets. Vous connaissez le résultat : 14 structures sont reconnues en Wallonie, puisqu’une est venue se rajouter en Brabant wallon. On couvre désormais 92 % du territoire par des expériences supracommunales. La récente organisation du colloque, qui a été fait à ma demande par l’Union des villes et communes, était de grande qualité. On a pu entendre à cette occasion les chercheurs de l’Institut de la décision publique de l’Université de Liège, dont le professeur Grandjean, qui se sont penchés sur la question dans le cadre d’une recherche-action qui envisage deux hypothèses. La première, un encadrement juridique des initiatives existantes, sans transfert de compétences et donc sans création d’un nouveau niveau de pouvoir. La seconde, une évolution des structures supracommunales vers un niveau de pouvoir et avec un transfert de compétence. Dans ce cas, il y a lieu de respecter le prescrit énoncé par l’article 162 de la Constitution. Les différentes interventions du colloque du 29 mars ont pu confirmer l’intérêt pour la démarche et l’importance de la maintenir et de la pérenniser. Le concept de supracommunalité est un concept encore fort large, il faut donc l’affiner, mais les élus de terrain l’apprécient. J’y suis également favorable, car face aux difficultés que rencontrent les pouvoirs locaux, la supracommunalité est un chemin plus direct pour rendre un meilleur service aux citoyens. Enfin, mon intention est de proposer prochainement au Gouvernement un décret a minima qui encadre les projets lancés de soutien aux structures supracommunales en s’assurant un financement pérenne pour ces projets de terrain. Ensuite, un jour peut-être, il faudra se poser les questions plus fondamentales que j’ai exprimées à l’entame. À ce stade, je veux rester à la fois pragmatique et réaliste, parce que le modèle de notre supracommunalité n’est pas encore abouti. Il faut fixer un cadre pour travailler ensemble, et non pas créer un nouveau « bidule » dans le paysage. En d’autres termes, je veux donner aux communes les moyens de fonctionner ensemble de manière harmonieuse, sans toucher aux institutions existantes. C’est la voie pragmatique que j’ai empruntée pour essayer d’avoir un décret qui consacrerait des institutions supracommunales.”
Réplique :
Je partage le souhait du Ministre d’encourager la supracommunalité, parce que je suis convaincu de l’opportunité que cela représente pour les communes. Il faut trouver la meilleure façon de le faire. Je n’étais pas présent à ce colloque, mais j’ai pu en lire le compte-rendu et c’était particulièrement intéressant.
Je note tout de même que l’Union des villes et communes plaide pour une rationalisation des structures, mais pas pour l’ajout d’une « nouvelle couche » à la lasagne. Il faut trouver cet équilibre et, partant, faire attention à une consécration légale qui ne serait pas couplée à une simplification institutionnelle. C’est aussi une condition de réussite. L’enjeu est de pouvoir générer des économies de moyens et une meilleure efficacité, une meilleure lisibilité aussi, puis un meilleur contrôle par les élus et les citoyens.
Tous ces éléments doivent être intégrés à la réflexion. J’espère que l’on pourra avancer dans cette direction dans les prochains mois.