Ce n’est pas la première fois que nous évoquons le cri d’alarme tiré par l’Union des Villes et Communes de Wallonie et l’Association des Provinces wallonnes à propos de la situation intenable des pensions. Récemment, le président de l’UVCW en rajoutait une couche par rapport aux difficultés financières des communes, estimant qu’elles étaient bel et bien dans le ravin.
Lors de nos derniers échanges, le Ministre des Pouvoirs locaux, Christophe Collignon, annonçait qu’une CIM Budget et Finances était prévue le 24 avril, dans le cadre de laquelle vous auriez notamment l’occasion d’évoquer le dossier des pensions locales.
Je reviens donc vers le Ministre afin de savoir ce que vous avez obtenu dans le cadre de cette CIM du 24 avril dernier :
- Quelles positions y avez-vous défendues et quels résultats avez-vous obtenus ? Une solution a-t-elle été trouvée pour revoir le financement des pensions des agents statutaires, ainsi que l’incitant au 2è pilier ? Quelles initiatives prenez-vous maintenant dans ce dossier des pensions ?
- En marge de cette CIM, vous évoquiez par ailleurs récemment dans la presse la nécessité d’objectiver la réalité des dépenses imposées aux communes via un organisme neutre, tel que la Cour des comptes, avec l’instauration d’un principe de compensation pour assurer la neutralité budgétaire. Avez-vous obtenu satisfaction ? Sinon, quelles initiatives complémentaires prenez-vous pour y parvenir ?
- Enfin, dans la presse, vous suggériez également, parmi les pistes de réformes envisagées, de créer un RIS au niveau wallon, afin de garantir une solidarité entre toutes les communes en matière de lutte contre la pauvreté. Comment mettez-vous concrètement en œuvre cette mesure ? Avez-vous consulté les différents acteurs quant à cette idée, en particulier les petites communes ?
Réponse du Ministre :
“Monsieur le Député, tout d’abord, nous avons saisi le CODECO à deux reprises et nous avons pu convaincre de faire avancer le dossier, même si le Fédéral n’est pas enchanté des demandes de la Wallonie puisqu’il s’agit de masses budgétaires importantes. Ensuite, nous avons saisi la CIM Budget et Finances, où j’ai accompagné M. le Ministre Dolimont, en vue d’obtenir des avancées dans le cadre de ce dossier. Je peux vous affirmer que nous sommes soutenus par les deux autres Régions ainsi que par la Communauté germanophone. Vous évoquez la problématique extrêmement préoccupante des pensions des agents statutaires. Indépendamment du choix asymétrique entre la Wallonie et la Flandre en matière de statutarisation, force est de constater que les évidences sur lesquelles nous nous appuyons ne permettent pas encore de forcer le barrage des contraintes ou des limites budgétaires fédérales. Nous persisterons et nous ne lâcherons rien dans ce combat de longue haleine.
Il est impératif que des mesures fortes soient prises visant au refinancement par le Fédéral du fonds de pension solidarisé de l’ONSSAPL, en ce compris un financement complémentaire du second pilier. Le régime des statutaires des pouvoirs locaux sera, à défaut de toute solidarité, inégalitaire au regard du régime des autres statutaires du Royaume. Quant au rôle que je souhaite donner à la Cour des comptes, il est exact qu’il a été débattu au sein de la CIM. L’objectif poursuivi est fondamental, à savoir pouvoir disposer à terme d’un mécanisme pérenne d’évaluation et d’indemnisation de l’impact pour les pouvoirs locaux des décisions prises au niveau fédéral. Il est un fait que le nombre de citoyens qui recourent au RIS pour survivre va croissant et que nous devons pouvoir répondre à ces situations de détresse. Le financement par le Fédéral du RIS n’étant pas intégral, il revient par défaut aux communes de prendre en charge une partie de ce financement. Ce financement partiel par les pouvoirs locaux pèse de plus en plus lourd. C’est plus particulièrement le cas pour les communes qui doivent combattre en première ligne et qui ont davantage de précarité sans pouvoir s’appuyer sur une croissance de leurs ressources propres. Il faut ouvrir le débat d’une solidarité intrawallonne et, a fortiori, lorsque les personnes qui combattent chaque jour cette précarité au sein des CPAS sont elles-mêmes en situation de détresse par manque de moyens.
Je suis persuadé que vous me rejoindrez sur la nécessité d’une solution. J’en viens aux questions que Mme Galant n’a pas posées, mais auxquelles nous avons répondu. Durant cette législature, plusieurs dispositions ont été prises pour aider financièrement les communes. Nous évoquons le mécanisme d’indexation annuel au-delà du seuil de l’inflation qui a permis, depuis 2019, d’augmenter de 23,4 % les efforts de la Région wallonne, qui le porte ainsi de 1,261 milliard d’euros à 1,558 milliard d’euros. Vous connaissez le dossier de reprise partielle du financement communal des zones de secours pour atteindre 135 millions d’euros en 2024. J’ai déjà dit qu’au-delà, j’étais favorable à une reprise à 100 % par les provinces.
Je cite également l’octroi d’aides diverses pour un total de près de 67 millions d’euros en 2020 et 2021, lors de la crise covid, afin de permettre aux communes de faire face à la situation ; l’adoption de diverses mesures d’assouplissement budgétaire afin de faciliter les budgets communaux de 2020 à 2023 ; l’octroi d’aides diverses pour 84 millions d’euros dans le cadre des inondations de 2021 pour reloger les sinistrés et agir sur le terrain ; la mise en place du plan Oxygène pour les communes les plus en difficulté ; le règlement complet du solde des compensations liées au plan Marshall, de près de 60 millions d’euros en ce compris 16 millions pour les provinces ; l’octroi d’une dotation exceptionnelle de 50 millions d’euros pour faire face à la hausse des dépenses énergétiques ; la saisine du CODECO. Tout cela me fait dire que nous nous délivrons un excellent bulletin. Mme Galant m’interrogeait sur une consultation de tous les directeurs financiers des autorités communales, puisqu’on connaît le résultat logique de cette consultation : davantage de financement régional et plus de prévisibilité au cours d’une mandature communale.
Vous m’interrogez d’ailleurs, dans une autre question, sur l’opération #AmbitionsCommunes, qui a également fait part d’une série de constats. Compte tenu de la situation budgétaire et de la pression européenne sur la situation globale belge, chaque entité publique et parapublique, en ce compris le Fédéral, la Région, les provinces et les communes, soit l’entité 1 et l’entité 2, ainsi que tous leurs services externalisés, doivent non seulement respecter leurs engagements, mais également porter une plus grande attention aux dépenses, mais aussi tenter d’optimaliser leurs ressources en évitant une pression fiscale trop importante sur nos concitoyens.”
Je partage évidemment l’avis du Ministre sur le fait qu’il faut absolument, au Fédéral, une réforme du Fonds solidarisé pour sortir de cette enveloppe fermée en termes de pension et du mécanisme d’incitant du deuxième pilier tel qu’il existe aujourd’hui. Je note par ailleurs qu’il n’y a pas encore de mouvement pour évoluer en ce sens. J’espère que cela pourra changer au plus vite. Je trouve particulièrement intéressant le principe de responsabilisation des différents niveaux de pouvoir quant à leurs décisions tel que vous le prenez. Je serai intéressé de savoir comment cela se concrétisera en pratique et quelles seront les étapes suivantes. On reviendra à la charge sur cette question.
Enfin, s’agissant de la nécessité d’une solution par rapport à la situation des CPAS et de l’iniquité entre communes, c’est évident qu’il en faut une. Il est clair que l’idéal doit rester un financement via le Fédéral et, si possible, un financement à 100 % par le Fédéral.
Maintenant, j’entends la logique d’une répartition par bassin. Je ne suis pas opposé à une logique de solidarité entre communes ; c’est une piste à laquelle on peut réfléchir, mais je crois vraiment que la priorité doit aller à un combat vers le Fédéral pour une reprise à 100 % du RIS.