Évaluer le plus vite possible l’impact de la réforme du décret paysage

Depuis le début de l’année académique, les témoignages d’étudiants paniqués abondent sur les réseaux sociaux au sujet de leur année à venir ou de leur financabilité. L’anxiété et l’incompréhension des étudiants face à la réforme du décret paysage et ses conséquences méritent d’être entendues.

Depuis quelques jours, une pétition circule par ailleurs, dans laquelle les étudiants expriment leur désarroi et font état de conséquences, parfois extrêmement difficiles, pour la suite de leurs études, voire sur leur santé mentale.

Deux situations sont en particulier mises en avant par les auteurs de la pétition et j’aimerais entendre la Ministre de l’Enseignement supérieur, Françoise Bertieaux, sur ces deux points précis, ainsi que sur les effets de la réforme du décret paysage dans son ensemble.

Premièrement, concernant la suppression du statut BAMA 30 et donc de la possibilité pour les étudiants ayant entre 16 et 30 crédits résiduels de bachelier de pouvoir entamer des cours de master. Cette suppression du statut BAMA 30 engendre pour les étudiants concernés une année supplémentaire particulièrement légère, une impossibilité de se voir avancer dans leur parcours et le paiement d’un minerval complet.

Deuxièmement, la pétition vise la situation des étudiants de Bac 1 pour lesquels des jurys auraient apparemment la possibilité de décider que des étudiants ayant obtenu entre 30 et 44 crédits ne peuvent anticiper des cours de Bac2. Toutefois, bien que le décret consacre la liberté des jurys afin de favoriser la réussite des étudiants, les décisions de ceux-ci doivent être individuelles, ce qui ne semble pas être le cas à la fac de droit de l’ULiège par exemple.

Ces deux situations ont des conséquences sur la financabilité des étudiants et sur l’allongement des études. Un point que la réforme du décret paysage entendait justement enrailler.

Cette pétition révèle de véritables difficultés dans le chef des étudiants, que nous ne pouvons pas ignorer. Une évaluation rapide des conséquences de la réforme semble donc absolument indispensable.

D’où ces questions :

  • Avez-vous pris connaissance de cette pétition et de ses demandes ? Une première analyse des conséquences de la réforme du décret paysage a-t-elle été menée ? Avez-vous rencontré les différents acteurs de l’enseignement supérieur sur le sujet ?
  • D’ici la fin de la législature, une évaluation est-elle prévue ?
  • Plus spécifiquement sur la question de la décision générale du jury de la faculté de droit de l’ULiège de ne pas permettre aux étudiants d’anticiper des crédits de BAC2 lorsqu’ils ont obtenu entre 30 et 44 crédits, comment cette décision est-elle compatible avec le décret paysage, alors que celui-ci prévoit une analyse individualisée de chaque situation ? Quelle a été votre réaction ? Comment accepter une telle discrimination avec les étudiants des autres facultés et universités ?

Réponse de la Ministre :

“Concernant les recours ayant fait l’objet d’un refus, en complément des informations que j’ai données lors de la dernière séance plénière, la réforme du décret «Paysage» n’a pas consacré un quelconque retour en force des jurys. Ceux-ci ont toujours été souverains. Autrement dit, rien n’a changé. Les jurys peuvent donc prendre des décisions différentes d’un établissement à l’autre et au sein de ceux-ci, entre facultés, selon leur réalité pédagogique propre. Le jury du bloc 1 en droit de l’ULiège a ainsi décidé de prolonger la décision prise il y a un an qui consiste, pour les étudiants du bloc 1 qui ont réussi moins de 45 crédits, à limiter leurs cours à ceux ratés du bloc 1. À cet égard, la réforme de l’article 100 du décret «Paysage» relatif au parcours des étudiants n’a pas modifié la disposition relative à cette catégorie d’étudiants. Selon le doyen de la faculté, les effets bénéfiques de cette décision ont été constatés dès la première année de sa mise en œuvre. Je n’y vois pas d’inégalité de traitement. J’ai néanmoins attiré l’attention des autorités académiques sur la nécessité d’informer les étudiants des modalités de fonctionnement de leur faculté. C’est pour le moins nécessaire. Je confirme également que les inscriptions des étudiants de première génération en droit dans la province de Liège sont en hausse, mais ce, uniquement pour l’ULiège. Les chiffres d’inscription dans les hautes écoles stagnent. Enfin, étant donné qu’une seule cohorte d’étudiants en première année de cycle a jusqu’ici commencé à bénéficier de l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation du décret «Paysage», une évaluation avant la fin de la législature me semble prématurée.”

Réplique :

Les jurys peuvent bien sûr prendre des décisions différentes, mais celles-ci doivent être basées sur une analyse individuelle reposant sur le parcours de chaque étudiant. Ici, non seulement les étudiants ont été pris par surprise, mais les décisions ne sont pas basées sur une analyse individuelle. Le fait d’appliquer une règle générale à l’ensemble des étudiants est contraire à l’esprit du décret «Paysage». En outre, c’est contre-productif sur le plan pédagogique, dès lors que les étudiants n’en sont pas informés au préalable. C’est la deuxième fois que le jury de l’ULiège opère de cette manière. Il serait utile que la Ministre lui rappelle, ainsi qu’aux autres jurys, le sens du décret «Paysage» afin d’éviter ce qui s’apparente à une mauvaise interprétation du décret, menant à une discrimination entre les étudiants des différentes facultés.