Réforme des allocations d’études : aller le plus loin possible en concertation avec les acteurs

Je souhaitais revenir sur les dernières discussions de la réforme des allocations d’études, maintenant que nous connaissons le résultat du conclave budgétaire.

Nous partageons toutes et tous le constat que les besoins concernant les allocations d’études sont importants et qu’une réforme en profondeur est nécessaire pour enrailler la précarité étudiante toujours plus présente.

6,4 millions sont sur la table pour une augmentation des moyens alloués aux allocations d’études. Il faut toutefois noter que ce sont les mêmes 6,4 millions qui étaient déjà sur la table avant le conclave.

Malheureusement, aucun moyen supplémentaire n’a donc été débloqué pour permettre de financer davantage la nouvelle réforme.

Et on sait d’avance que ce budget restera malheureusement insuffisant pour répondre aux besoins très importants des étudiants.

On peut évidemment regretter l’absence d’augmentation de budget, mais je crois qu’il faut aujourd’hui avancer. Certaines mesures sont possibles à mettre en œuvre, même dans cette enveloppe.

Pour cela, je pense utile de repartir de l’expertise des acteurs de terrain.

La Ligue des familles à la suite de votre réponse en séance plénière sur le sujet a souhaité partager avec les membres de notre commission l’étude et la méthodologie qu’ils ont mis en place dans ce dossier.

Les acteurs de terrains ont ainsi d’abord évalué, au plus proche de la réalité, le coût des études en prenant en compte l’évolution du coût de la vie et en repartant de la méthodologie du CERPE (lequel se basait déjà sur les chiffres de BDO-SONECOM et Ligue des familles), avant d’ensuite demander une hausse des montants prévus pour la réforme, pour finalement tabler sur les options politiques envisageables.

Ces associations prônent notamment de mettre en place une allocation d’étude un peu plus élevée en début de secondaire et supérieur que dans les autres années pour faire face aux investissements plus lourds en début de cursus. On pense ici à des achats comme celui d’un ordinateur. Elles abordent aussi la question du remboursement des frais de transport en fonction de leur coût réel, tant pour les kotteurs que pour les navetteurs, sachant que les formulaires actuels des allocations d’études demandent déjà d’expliquer comment on effectue les trajets. Elles proposent enfin une allocation spéciale pour l’ensemble des études qualifiantes (le système actuel prévoit une AE spéciale pour les élèves du professionnel), idem pour les frais de stages.

Avec les moyens mis sur la table, Madame la ministre va devoir faire des choix. Pour nous, l’expertise de terrain de la société civile, et la concertation avec ces associations sont des éléments essentiels pour une réforme ancrée dans la réalité des étudiants et des acteurs de terrains.

D’où ces questions à la Ministre de l’Enseignement supérieur, Françoise Bertieaux :

  • Avez-vous déjà rencontré ces organisations ? Une rencontre est-elle prévue dans les semaines à venir ? Compte-tenu du résultat du conclave et des moyens présents pour la réforme, quel agenda avez-vous décidé de mettre en place pour la suite de celle-ci ? Allez-vous intégrer ces propositions relatives aux trajets et au matériel spécifique à la première année ?
  • Comment prévoyez vous d’agir avec les 6,4 millions pour les allocations d’études ?
  • De manière plus générale sur le conclave budgétaire, sur les infrastructures universitaires, un budget de 15 millions a été débloqué. Quel en sera l’usage exact ? Pour une rénovation énergétique ? Uniquement la rénovation des bâtiments ou la construction aussi ?

Réponse de la Ministre :

“Les participants au conclave budgétaire s’étaient donné pour objectif de limiter les nouvelles dépenses afin de contenir le plus possible le déficit – certains pensaient encore que c’était insuffisant – et de privilégier le secteur de l’aide à la jeunesse, vu la détresse et l’urgence de la situation. Vous venez de vous en réjouir il y a quelques minutes. Il est entendu que les nouvelles dépenses n’ont pu porter sur toutes les matières. Comme je l’ai indiqué lors de la séance plénière du 4 octobre dernier, j’ai pris connaissance des études menées par la Ligue des familles, le RWLP, la FEF et leForum-Bruxelles contre les inégalités sur les allocations d’études. Il y a quinze jours, en réponse aux questions d’actualité, j’ai indiqué que nous avions effectué une rapide simulation budgétaire de l’ensemble des demandes reprises dans les documents. Il apparaît que ces demandes nécessiteraient un budget, non de 100 millions d’euros comme je vous l’avais dit à ce moment-là, mais en réalité de 138 millions d’euros supplémentaires. Dans le contexte budgétaire actuel, cela semble difficilement envisageable.

Par ailleurs, la suppression du critère de la finançabilité ainsi que la première partie de la réforme ont déjà permis d’élargir le champ d’application des allocations d’études, ce qui a eu un impact significatif sur le budget global. Nous avons pris bonne note des recommandations reprises dans l’étude. Bien entendu, nous réfléchirons à l’opportunité d’en intégrer certaines dans le projet de réforme. Cependant, j’attire votre attention sur le fait que certaines propositions, dont celles que vous citez dans votre question, Monsieur Demeuse, prévoyant des montants supplémentaires dans des cas spécifiques, tendent à alourdir ou à compliquer le processus, tant pour l’usager qui devra fournir des documents complémentaires que pour l’administration qui devra mener une analyse plus détaillée des dossiers. Cela risque, je le crains, d’allonger la durée de traitement des dossiers.

À titre d’exemple, l’idée de donner une aide complémentaire pour l’équipement de l’enseignement qualifiant est certes sympathique. Malheureusement, ce budget est extrêmement difficile à chiffrer, car vous devez évaluer les besoins filière par filière et vous assurer que chaque établissement demande bien le même type d’équipement pour chaque filière. Ce n’est pas garanti. Ainsi, s’il est impossible de chiffrer les besoins des étudiants, je ne vois pas comment je pourrais établir un budget.”

Réplique :

La situation sociale des étudiants est très difficile. Nous avons pris des engagements forts dans la Déclaration de politique communautaire (DPC). Ces engagements ont été réitérés dans la résolution interparlementaire visant à lutter contre la précarité étudiante et à améliorer les conditions de vie des étudiants. Nous devons les respecter. La somme de 6,4 millions d’euros ne suffira malheureusement pas pour répondre à tous les besoins. Je comprends évidemment la difficulté de trouver 138 millions d’euros. Cependant, il y a sans doute une occasion manquée quand on sait que vous n’avez même pas pu dégager 1 million de plus. Les choix seront difficiles.

Nous n’aboutirons pas à la grande réforme que nous souhaitions. Mais nous devons aller le plus loin possible, en concertation avec les acteurs concernés. J ’entends les points d’attention soulevé sur le risque de complexification du processus. J’y suis sensible et nous devons y être attentifs. Mais si nous travaillons simultanément à renforcer l’automatisation du processus dès le départ, cela permettra de simplifier les choses et évitera d’alourdir l’ensemble du processus. En tout cas, dialoguons, parlons avec les différents acteurs pour trouver les meilleures solutions et prioriser les investissements à partir de l’enveloppe budgétaire disponible. C’est l’appel que je lance à la Ministre.