C’est voté ! Sous l’impulsion (entre autres!) des écologistes, le Sénat a adopté des mesures inédites à l’échelle nationale pour renforcer la participation citoyenne et réoxygéner notre démocratie : de l’association à l’élaboration des lois aux budgets participatifs à tous les niveaux en passant par le renfort du droit de pétition ou encore à la participation aux futures réformes de l’État.
À l’aube du 200e anniversaire de la Belgique et à l’heure où le fossé n’a jamais été aussi grand entre le population et le monde politique, c’est un vote qui me réjouit au plus haut point. Il est le résultat de plus d’un an et demi de travail, dont six mois d’échanges intenses avec un large panel d’expert.e.s.
C’est à présent au tour des différents parlements de s’emparer de ces mesures et de les concrétiser.
À LIRE AUSSI | Article publié dans l’Echo
Voici mon intervention de ce vendredi 18 juin en plénière du Sénat :
Madame la Présidente,
Chers collègues,
Je suis particulièrement heureux d’être devant vous ce matin pour soutenir ce rapport d’information au nom du groupe Ecolo-Groen.
Car le rapport que nous votons aujourd’hui, ce n’est pas seulement l’aboutissement d’un an et demi de travail intense au sein de la commission du renouveau démocratique. C’est aussi un véritable tournant !
C’est la première fois qu’à l’échelle de notre pays, une assemblée affirme haut et fort la nécessité de faire évoluer notre système démocratique vers un système qui fait de la participation citoyenne une réelle priorité. A tous les niveaux.
Et si ce rapport est si important, c’est parce qu’il y a urgence ! Il n’y a plus une minute à perdre.
Le fossé entre citoyens et monde politique est plus grand que jamais. La méfiance de la population envers les institutions, et le monde politique en particulier, est plus forte que jamais.
Lors des dernières élections, en 2019, plus d’un million et demi de personnes ne sont soit pas allées voter, soit ont voté blanc. Si l’abstention était représentée au parlement fédéral, elle formerait tout simplement le premier parti !
En 2019 toujours, l’enquête Represent réalisée auprès de 7500 Belges concluait qu’une grande majorité des personnes interrogées estiment que les responsables politiques ne comprennent pas ce qui se vit dans la société, qu’ils sont déconnectés de la réalité.
Et depuis lors, la pandémie est encore passée par là, rendant aujourd’hui plus nécessaire que jamais la prise de mesures fortes pour tenter de retisser ce lien de plus en plus distendu avec les citoyens.
Pas une seule fois, chers collègues, notre Constitution ne mentionne le mot « démocratie ». Elle mentionne encore moins la démocratie participative. Or, de toutes les rencontres et auditons menées pour élaborer ce rapport, il ressort que la démocratie belge telle que nous la connaissons, telle qu’elle a été pensée il y a bientôt 200 ans, a besoin d’un nouveau souffle ! D’un nouveau modèle plus efficace et qui suscite davantage d’adhésion au sein de la population.
Cela nécessite donc de permettre à la population de participer à la prise de décision davantage que tous les 5 ou 6 ans, à l’occasion des élections. Et si cela ne signifie évidemment pas que l’on doive remplacer notre système représentatif, le but est bien de le compléter, pour l’alimenter et le réoxygéner ! En réalité, le développement de la démocratie participative renforce et légitime le système représentatif.
C’est tout le sens de ce rapport d’information : donner à la Belgique un système démocratique modernisé pour son 200è anniversaire !
Et pour y parvenir, notre Sénat a particulièrement bien joué son rôle. Je veux vraiment saluer ici le travail de fond et de qualité mené au sein de la commission du Renouveau démocratique, sous la présidence de Farida Tahar.
C’est un travail de longue haleine, coconstruit avec la société civile, avec plus de 6 mois d’auditions d’experts de la participation citoyenne et d’auteurs d’initiatives participatives en Belgique et à l’étranger.
Tous ces apports, tous ces exemples de ce qui se fait déjà en Irlande, en France, mais aussi chez nous, au niveau des communes, en Communauté germanophone, à Bruxelles et en Wallonie avec les commissions délibératives, ont alimenté nos réflexions. Cela nous a permis de tirer les enseignements de ce qui fonctionne et des écueils à éviter.
Et c’est riches de ces expériences que nous avons travaillé, avec les collègues rapporteurs, à l’élaboration de recommandations particulièrement ambitieuses.
Je veux d’ailleurs en profiter pour remercier profondément l’ensemble des rapporteurs pour tout le travail de qualité mené ces derniers mois. Mais aussi les services du Sénat pour l’accompagnement et le suivi très précieux qu’ils ont assuré.
Aujourd’hui, nous pouvons être fiers, chers collègues, des propositions que nous mettons sur la table et qui s’adressent à l’ensemble des niveaux de pouvoirs du pays.
Avec un objectif : accroître considérablement le rôle des citoyens à tous les étages du fonctionnement démocratique de notre pays. Et surtout, en faisant en sorte que ces initiatives ne soient de simples gadgets pour faire joli ou pour faire plaisir.
Non, la volonté est bien d’ancrer ces initiatives dans le long terme, de façon cohérente entre les niveaux de pouvoirs, avec des outils pour assurer un suivi et une implication réelle des citoyens les plus éloignés de la politique.
Parmi les recommandations, je veux particulièrement mettre en avant la volonté de donner aux citoyens un rôle actif dans le processus d’élaboration des lois, en leur donnant un droit d’amendement et un droit d’initiative législative. C’est véritablement quelque chose d’inédit !
Il y a aussi le renfort du droit de pétition, avec une plateforme unique pour tous les parlements permettant de déposer sa pétition sans plus devoir se tracasser de la répartition des compétences qui constitue souvent un réel frein.
La mise en place de commissions délibératives dans tous les parlements, avec des systèmes les plus similaires possibles, est un autre élément à épingler, tout comme le soutien à la mise en place de budgets participatifs dans un maximum de communes, mais aussi à d’autres niveaux supra-locaux, dans les régions voire au fédéral !
Et puis notre assemblée a aussi elle-même un rôle important à jouer en matière de participation citoyenne. Le Sénat est le lieu idéal pour pratiquer la démocratie participative. Et le rapport le prévoit explicitement, en proposant notamment d’associer les citoyens aux futures réformes de l’Etat via une assemblée citoyenne au sein du Sénat !
Je pourrais encore citer le renfort des processus de consultation populaire, la plateforme en ligne pour le dépôt de suggestions, ou encore la mise en place d’une réelle coordination des initiatives entre les différents parlements.
Mais le dernier point sur lequel je veux insister, c’est une autre plus-value particulièrement précieuse de ce rapport. C’est le guide des bonnes pratiques à suivre, et desquelles pourront s’inspirer les différents niveaux de pouvoir, pour assurer la réussite des processus participatifs. Notamment pour garantir une réelle inclusivité et représentativé des initiatives !
Via le tirage au sort, la rétribution des participants, l’organisation du travail de façon à permettre à chacun de s’exprimer… Pour éviter que ce soient toujours les mêmes qui participent, et pour aller chercher les plus éloignés du monde politique.
Restent maintenant aux différents niveaux de pouvoir et aux parlements à se saisir de ce rapport, de ces recommandations, pour les mettre en œuvre.
C’est notre responsabilité chers collègues. Nous devons porter ces recommandations au sein de nos assemblées respectives pour les concrétiser !
Car ce rapport ne doit pas rester un bout de papier que l’on classe dans la bibliothèque du Sénat. Le travail consacré, l’ampleur et la qualité des propositions, méritent que ce rapport vive, qu’il irrigue la société et les débats dans toutes les assemblées.
En ce compris ici, au sein du Sénat, où nous devons aussi contribuer à mettre en œuvre concrètement la participation citoyenne !
Car il y a aujourd’hui non seulement urgence, mais aussi un momentum.
Avec la crise sanitaire sans précédent à laquelle nous sommes confrontés depuis plus d’un an, qui constitue le plus grand choc depuis les derniers conflits mondiaux, nous avons l’occasion de faire évoluer notre démocratie pour penser l’avenir en y associant réellement les citoyens.
Les deux conflits mondiaux avaient marqué des avancées décisives en matière démocratique, avec l’instauration du suffrage universel masculin en 1919 et féminin en 1948. On peut aujourd’hui passer une nouvelle étape et saisir l’opportunité de faire à nouveau évoluer notre démocratie de manière décisive, en déployant des outils de participation citoyenne, du local au fédéral, pour associer la population à la reconstruction de notre société !
C’est pour toutes ces raisons que nous soutiendrons ce rapport et les mesures ambitieuses qu’il contient. Je vous remercie.
Le communiqué de presse d’Ecolo
Sénat : des mesures ambitieuses pour renforcer la démocratie participative à tous les niveaux de pouvoir
À l’aube du 200e anniversaire de la Belgique, le Sénat doit adopter cet après-midi en séance plénière un rapport consacré au renouveau démocratique contenant de nombreuses propositions ambitieuses en matière de participation citoyenne à l’échelle nationale. Objectif: réoxygéner notre démocratie.
Droit d’amendements sur des textes déposés au sein des différents parlements, droit d’initiative législative, participation aux futures réformes de l’État,… Des mesures parmi de nombreuses autres, inédites à l’échelle nationale, qui seront ce jour adoptées par le Sénat afin de rendre notre démocratie plus participative.
Car l’adoption de ce rapport représente l’aboutissement de plus d’un an et demi de travail, mené avec la société civile, sur base d’expériences à l’étranger et de dizaines d’heures d’auditions d’experts d’universités belges et d’auteurs d’initiatives telles que le G1000, notamment. Alors que notre Constitution ne mentionne pas une seule fois le mot « démocratie » et évoque encore moins la participation citoyenne, cette reconnaissance de la participation en tant que priorité constitue un pas important aux yeux des écologistes qui rappellent l’urgence de faire évoluer notre modèle pour associer les citoyens à la prise de décisions, au-delà des seules échéances électorales.
En effet, au vu du fossé entre citoyens et représentants politiques, encore accentué par la crise sanitaire, le Sénat pose un constat : celui de la nécessité d’accroître considérablement le rôle des citoyens dans le fonctionnement démocratique de notre pays et ce, à tous les niveaux de pouvoir.
“En 2019, un million et demi de personnes ne sont pas allées voter ou ont voté blanc. Cette même année, une étude rapportait que 85% des citoyens interrogés estimaient que les politiques ne comprenaient pas ce que vivait la société. Des chiffres extrêmement interpellants qui nous ont amené à porter une réflexion sur la manière de réoxygéner la démocratie. Nous avons donc développé des propositions ambitieuses destinées à passer d’un système purement représentatif à un système qui associe réellement les citoyens », explique Rodrigue Demeuse, sénateur Ecolo et rapporteur de ce dossier.
Parmi les mesures ambitieuses que propose le Sénat dans son rapport, épinglons l’association directe des citoyens au processus d’élaboration des lois en leur octroyant un droit d’initiative législative et en leur permettant d’amender les lois, décrets et ordonnances qui sont proposées dans les parlements. Mais aussi, un renfort du droit de pétition avec la création d’un portail unique à l’échelle du pays pour introduire celles-ci plus facilement. Ou encore la mise en place d’une assemblée citoyenne au Sénat pour notamment préparer les prochaines réformes de l’État avec les citoyens. Sans oublier la création de budgets participatifs à tous les niveaux de pouvoir, en ce compris supra-locaux, pour encourager les projets citoyens.
Afin de guider les différents niveaux de pouvoir, le rapport consacre également un large volet aux conditions indispensables à la réussite et la mise en œuvre de processus participatifs efficaces. En effet, pour les écologistes, il est essentiel que ces processus ne se réduisent pas à de simples gadgets, mais permettent réellement d’impliquer les personnes les plus éloignées du monde politique.
« Par l’adoption de ce rapport, l’objectif du Sénat est de donner un ancrage institutionnel solide à des formes de participation réelles pour doter la Belgique d’un système démocratique réoxygéné à l’aube de son 200e anniversaire! Avec cette volonté transversale de mieux coordonner les différentes initiatives, mais surtout de les pérenniser et de les rendre les plus accessibles possibles aux citoyens, les recommandations mises sur la table constituent une première à l’échelle de notre pays. Au tour maintenant de chaque parlement de s’en saisir pour les mettre en oeuvre”, conclut Farida Tahar, sénatrice Ecolo et présidente de la Commission Renouveau démocratique.