C’est un nouveau drame qui a ébranlé la communauté étudiante la nuit du 30 au 31 octobre dernier, avec le décès du jeune Antonin, 19 ans, survenu après les activités de baptême organisées par plusieurs cercles étudiants namurois à Gedinne.
Si toute une série de questions restent posées et que l’enquête suit son cours, les premières indications laissent entendre que l’abus d’alcool serait à l’origine de cette mort tragique. Le procureur du Roi indiquait d’ailleurs que, si l’alcool n’avait pas eu sa place pendant les activités de baptême en tant que telle, il aurait coulé à flots durant la soirée qui a suivi.
Ce drame nous interpelle donc, malheureusement une fois de plus, une fois de trop, sur l’encadrement du folklore étudiant, et plus globalement sur la problématique de la consommation d’alcool chez les jeunes.
Il y a moins d’un mois, j’interrogeais malheureusement déjà la Ministre de l’Enseignement supérieur, Valérie Glatigny, sur le sort de ces deux jeunes femmes victimes de graves accidents sur les campus, dont l’une en lien avec des activités folkloriques.
On ne peut pas, comme on l’entend trop souvent dans le chef des établissements, s’en laver les mains et dire que l’encadrement des baptêmes n’est pas de leur responsabilité sous prétexte que cela ne se passe pas toujours sur le campus. De même, on ne peut pas se contenter de dire que tout est réglé parce qu’une charte encadre les activités de baptême, sans se préoccuper de ce qui se passe juste après durant la soirée.
D’où ces nouvelles questions adressées à la Ministre Glatigny :
- Quelle est votre réaction face à ce nouveau drame ? Quelles mesures avez-vous prises pour apporter des réponses rapides face à cette problématique de l’encadrement, non seulement des activités de baptême, mais aussi de ce qui les entoure ?
- Le processus d’évaluation de la charte va-t-il intégrer cette dimension ? Comment responsabiliser davantage les établissements ?
- Qu’en est-il de la lutte contre l’abus d’alcool chez les jeunes ? Que mettez-vous en place pour y faire face de façon systémique ?
Réponse de la Ministre :
“Le décès d’un jeune âgé de 19 ans est une tragédie. Par respect pour la famille de la victime et pour le travail des enquêteurs et de la justice, je ne commenterai pas, à ce stade, le drame et ses circonstances. Pour rappel, des analyses sont d’ailleurs toujours actuellement en cours.
Sans préjudice de leurs résultats et, de manière générale, une sensibilisation aux effets d’une consommation abusive d’alcool et un renfort de la prévention s’imposent. Des campagnes sont déjà menées sur le terrain, comme par exemple la campagne “ça m’saoule” portée par les étudiants de l’ULB ou la campagne “guindaille2-0” menée par Univers santé, association de promotion de la santé, en étroite collaboration avec les représentants des organisations étudiantes (AGL, GCL, Organe, Fédération Wallonne des Régionales de l’UCL).
Comme vous le rappelez, une charte encadrant les activités de baptêmes a été rédigée. Je l’ai communiquée en 2020 à l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur. Elle définit un socle commun minimal pour s’assurer que les activités estudiantines folkloriques et festives s’inscrivent dans un cadre respectueux du bien-être physique et moral pour tous les participants. La charte prévoit, par exemple, la mise en place d’un service d’ordre composé d’étudiants identifiés et ne consommant pas d’alcool lors des activités de baptême.
Une réflexion plus particulière doit toutefois être menée concernant la consommation abusive d’alcool lors d’activités estudiantines, y compris en-dehors des baptêmes.
C’est pourquoi, dans le cadre de l’évaluation de la charte encadrant les activités de baptême dont j’ai chargé l’ARES dès le mois d’août dernier, j’ai demandé que soit organisée une conférence, à laquelle je prendrai part, réunissant entre autres les autorités académiques, les cercles étudiants et les autorités locales et des experts psychosociaux pour réfléchir à la lutte contre la consommation excessive d’alcool dans le contexte des activités estudiantines et à la manière d’organiser ce type d’activités en toute sécurité.
Cette conférence ne doit sans doute pas occulter le besoin d’une réflexion plus large sur la consommation excessive d’alcool dans notre société. Consommation qui commence bien souvent avant l’entrée dans l’enseignement supérieur.
Ayant moi-même été baptisée, je suis convaincue qu’il est possible d’organiser des activités folkloriques dans le respect de l’intégrité physique et morale des étudiants, la majorité d’entre-elles se déroulant d’ailleurs sans problème.
L’évaluation de la charte et les résultats de ces réflexions devront aboutir au plus tard en mai 2022 afin, le cas échéant, de communiquer une charte élargie et revisitée avant la rentrée académique 2022-2023.”
Il y a une véritable responsabilité collective pour encadrer et faire évoluer ces activités de baptême pour que plus jamais un seul drame de ce type ne se reproduise ! Et certains établissements doivent arrêter de s’en laver les mains !
Il existe une grande différence entre des activités folkloriques accueillantes, bienveillantes, respectueuses de chacun.e, qui solidifient les liens entre pairs, et des soi-disant rituels dégradants qui enseignent l’humiliation et l’indifférence en toute impunité.
Mais aussi une réflexion de fond qui doit être menée sur l’abus d’alcool chez les étudiants. Je suis certain que les jeunes font partie de la solution, ils doivent être impliqués dans les décisions qui les concernent et ils doivent être responsabilisés – ils sont demandeurs de ceci.
La charte doit être évaluée au plus vite et rendue obligatoire. Il faut aller plus loin, notamment en renforçant le travail de sensibilisation et la possibilité de recours aussi pour dénoncer les abus ! Ces habitudes avalissantes ne sont pas dignes de notre enseignement supérieur et du modèle de société qu’il entend construire.