Partir du terrain pour remédier à la pénurie de médecins généralistes en Wallonie

Plus d’une commune wallonne sur deux connaît une pénurie de médecins généralistes. Et plus de 40 communes connaissent une pénurie grave. Dans certaines communes, il n’y a même tout simplement plus un seul généraliste. C’est notamment le cas à Berloz et Daverdisse, avec des conséquences particulièrement dramatiques pour la santé publique des Wallonnes et des Wallons, notamment pour les personnes âgées qui ont des difficultés à se déplacer.

On a pourtant vu avec la crise sanitaire à quel point les médecins généralistes jouent un rôle fondamental dans l’accès aux soins, dans l’accompagnement et la prévention des maladies, mais aussi dans le lien entre les patients et le système de santé. Il suffit de voir l’adhésion plus importante à la vaccination pour les populations en contact avec un médecin généraliste.

Or, malgré cette pénurie dramatique et cette crise sanitaire sans précédent, la pression est à nouveau particulièrement forte pour restreindre encore l’accès aux études de médecine et pour limiter le nombre de jeunes diplômés pouvant exercer avec un numéro INAMI.

De telles menaces, en dehors de toute objectivation des besoins réels, sont absolument inacceptables.

La Ministre de l’Emploi, Christie Morreale, indiquait il y a quelques mois que la mise en place d’un concours serait stérile et contre-productive et que c’était l’inverse de ce qu’il fallait faire.

Mais il ne suffit pas aujourd’hui de s’opposer. Il faut aussi prendre nos responsabilités à chaque niveau de pouvoir. Le Gouvernement de la FWB a entamé des négociations avec le Fédéral pour tenter de dégager une solution pérenne qui permette de ne plus prendre en otage des milliers d’étudiants chaque année.

Et nous avons aussi une responsabilité en Région wallonne, à la fois dans le travail sur l’identification des besoins de la population en matière d’offre de soins et dans le soutien à l’installation des jeunes généralistes.

Concernant l’identification des besoins, la mise en place annoncée de l’organe interfédéral est un préalable indispensable. La Région doit y jouer un rôle en l’alimentant avec les données qui sont à sa disposition pour objectiver au mieux les besoins actuels et futurs de la population.

D’où ces questions adressées à la Ministre :

  • Quelles initiatives avez-vous prises auprès du Fédéral afin que cet organe voit le jour au plus vite ? Plaidez-vous pour que la Région y joue un rôle moteur ?
  • Confirmez-vous que l’instauration d’un concours constitue toujours le contraire de ce qu’il faut faire ?
  • En ce qui concerne le soutien à l’installation des généralistes, l’enjeu est surtout d’encourager les jeunes médecins à s’installer dans les zones en pénurie, surtout rurales. On sait en effet que 48% des médecins actifs aujourd’hui ont plus de 55 ans. Des dispositifs existent, mais ils ne suffisent visiblement pas et nous devons donc redoubler d’efforts. Vous avez annoncé le lancement prochain d’assises de la première ligne et je m’en réjouis. Comment ces assises s’inscrivent-elles dans votre stratégie de valorisation et de soutien à l’installation des jeunes généralistes ? Quels sont les objectifs que vous poursuivez ?
  • Et de façon plus générale, quelles autres initiatives prenez-vous dès à présent pour y parvenir ?

Dans sa réponse, la Ministre indique entre autres que :

– “L’année dernière nous avions 156 demandes de primes Impulseo qui ont été acceptées. À peu près 3,3millions d’euros ont été dépensés pour venir en soutien à l’installation de médecins dans des zones qui n’étaient pas ou moins couvertes. Cela représente quasi deux fois plus que l’année précédente et l’on peut s’en réjouir. On a pour le moment le dernier rapport qui date de 2021 et qui montre que le nombre de communes en pénurie a diminué de 11. Cela veut dire qu’il reste encore, c’est le verre à moitié plein. Cela progresse puisque l’on a 11 communes de moins. Le verre à moitié vide ce sont les 132communes qui sont encore en pénurie, dont 40 en pénurie sévère. On a aussi le dispositif via le FEADER. On avait soutenu, lors de 6 appels à projets, 24 associations de santé intégrée pour 30 dossiers d’investissement. Cela permet aussi d’ancrer solidement ces opérateurs dans les zones plus rurales, voire semi-rurales, moins bien loties au niveau du nombre de médecins généralistes. On a sur le territoire et c’est bien de pouvoir le dire, 93maisons médicales, que l’on appelle ASI. En 2022, nous en avons agréé 8 de plus, ce qui a porté à 101 le nombre d’ASI. Je pense que c’est une manière de pouvoir aborder la suite dans les Assises de la première ligne. Vous l’avez évoqué. En tout cas, pour le projet FEADER, on va prolonger la programmation. Je vais le proposer au Gouvernement – et je pense que je serai suivie – afin que la programmation 2023 à 2027 permette aussi à d’autres associations de soins intégrés de bénéficier de ce soutien spécifique, c’est-à-dire les fameuses maisons médicales.

– “Nous devons travailler de manière coordonnée, mutuelle et nécessaire avec l’autorité fédérale pour des tas de secteurs. L’objectif de l’organe consultatif interfédéral est de réaliser cette bonne synergie et cet échange de données et d’informations entre les niveaux de pouvoir, où chacun des partenaires assume sa responsabilité dans le cadre de ses compétences, mais en recherchant la cohérence.

La Ministre a raison de souligner toutes les initiatives qui existent déjà et qui montrent effectivement les premiers effets positifs. Forcément, il faudra aller plus loin et renforcer ces différents dispositifs.

Maintenant, je voudrais aussi insister sur la nécessité de sortir de l’idéologie dans ce débat et de travailler vraiment sur base des besoins objectivés. C’est le préalable indispensable dans tout ce débat.

Pour cela, on doit enfin mieux connaître la situation sur le terrain. On doit mieux organiser la situation telle qu’elle existe. Je pense que, dans le cadre de la mise en place de l’organe interfédéral qui est annoncé, c’est une étape fondamentale. Là, le rôle que pourra jouer la Wallonie sera un rôle important.

Je crois vraiment beaucoup, par ailleurs, dans toutes les initiatives qui pourront naître de ces fameuses Assises de la première ligne qui pourront contribuer aussi à alimenter les réflexions en la matière.

Je voulais juste terminer en insistant sur des acteurs qui me paraissent importants, ce sont les communes, les pouvoirs locaux, qui jouent aussi un rôle important en la matière et que l’on ne doit pas oublier dans la réflexion.