Développement des énergies renouvelables en Wallonie : un momentum à saisir !

La guerre en Ukraine est avant tout une tragédie pour les Ukrainiennes et les Ukrainiens, qui se trouvent plongés dans l’horreur et que nous devons absolument continuer à soutenir.

Mais l’impact du conflit et de ses conséquences est également gravissime sur de très nombreux autres aspects de notre société. Elle provoque notamment une explosion dramatique des prix de l’énergie. En quelques jours, les prix du gaz ont ainsi grimpé de plus de 350%. Or, on sait à quel point l’Union européenne est malheureusement trop dépendante du gaz russe, puisque 1/3 de celui-ci provient de Russie. Même si c’est moins le cas de la Belgique, dont seulement 4% du gaz provient de Russie, les prix sont formés au niveau européen et sont donc bien dépendants de cette situation.

Il en va de même pour le pétrole et pour l’uranium, dont 26% de celui que nous utilisons dans nos centrales provient de Russie. Il ne s’agit donc pas de solutions alternatives possibles à long terme pour assurer une indépendance.

Outre les mesures urgentes nécessaires pour soutenir les ménages face à la hausse de la facture d’énergie, la seule solution est donc de réduire notre dépendance à la Russie en accélérant la transition énergétique, via la diminution de la consommation par l’isolation et via le développement des énergies renouvelables.

L’Union européenne l’a bien compris, puisqu’elle a annoncé, dans son plan pour réduire d’ici fin d’année de 2/3 sa dépendance au gaz russe, une accélération du déploiement des énergies renouvelables et de l’hydrogène.

Le Ministre wallon de l’Énergie, Philippe Henry, confirmait en séance plénière la nécessité d’accélérer les choses au niveau wallon en se montrant plus ambitieux encore que ce qui se fait à l’heure actuelle en la matière. D’où ces questions :

  • Dès lors, Monsieur le Ministre, quelles initiatives avez-vous prises pour concrétiser cette ambition ? Quelles mesures le Gouvernement prend-il pour accélérer le développement des énergies renouvelables (éolien, photovoltaïque, biométhane…) et de l’isolation afin d’assurer notre indépendance énergétique ?
  • Quels freins ont été identifiés jusqu’à présent et qu’a mis en place le gouvernement pour y répondre ?

J’ai vu plusieurs bonnes nouvelles dans les décisions du gouvernement de jeudi dernier. Notamment quant à l’aboutissement de la pax eolienica pour le mois de juin.

Mais aussi par rapport à la simplification des primes pour l’installation de chauffage durable et le soutien aux audits énergétiques.

Et puis surtout, l’adoption du décret mettant en œuvre la nouvelle méthodologie tarifaire et les communautés d’énergie !

Autant de bonnes nouvelles sur lesquelles c’est aussi l’occasion d’interpeller le Ministre.

Le Ministre évoquait par ailleurs des mesures en matière de géothermie et d’hydrogène. Comment accélérez-vous les choses en la matière ?

Réponse du Ministre

“Je m’inscris tout à fait dans l’idée de lier le renforcement de l’indépendance énergétique et le développement des énergies renouvelables. Ce développement devant, bien entendu, être couplé avec l’amélioration de l’efficacité énergétique et la réduction de la consommation d’énergie. Comme je l’ai déjà annoncé en séance plénière, nous travaillons à l’accélération des efforts au niveau wallon.Tout d’abord, nous allons nous inscrire activement dans les travaux menés par la Commission pour mettre en œuvre le plan RePower EU.

Ce plan reposera sur deux piliers qui touchent tous les deux aux compétences régionales : (1) la diversification de l’approvisionnement en gazde l’UE, grâce à une augmentation des importations provenant de fournisseurs non russes ainsi qu’à un accroissement des volumes de production et d’importations de biométhane et d’hydrogène ; (2) l’accélération de la sortie des combustibles fossiles en renforçant l’efficacité énergétique et le recours aux énergies renouvelables. Mes collaborateurs et mes administrations suivent attentivement les travaux européens afin de contribuer à la mise en œuvre de ce plan pour la Wallonie. Je me dois de rappeler qu’à l’heure actuelle, les politiques et mesures sont déjà en place pour soutenir le déploiement des énergies renouvelables. Les budgets sont disponibles. Vous avez raison de poser la question des freins, car c’est là que se situent les efforts à fournir désormais.

Pour l’éolien et le solaire photovoltaïque de puissance, le principal obstacle réside dans l’octroi des permis. Nous y travaillons notamment en élaborant une pax eolienica II dont nous espérons qu’elle permettra un déploiement rapide et harmonieux de l’éolien sur notre territoire. En ce qui concerne la rénovation des permis et l’installation de systèmes de chauffage ou le photovoltaïque individuel, les freins se situent plutôt au niveau de la disponibilité de main d’œuvre et parfois même de matériaux. C’est également un point d’attention de la communication européenne. Nous avons choisi, en Wallonie, d’y travailler par la mise en œuvre des alliances emplois pour la rénovation et pour les énergies renouvelables.

En ce qui concerne la géothermie, le Gouvernement wallon a débloqué 7,5millions d’euros par le biais du Fonds wallon Kyoto et du Plan de relance de la Wallonie. Un appel à projets géothermie peu profonde, c’est-à-dire moins de 1200 mètres, a été publié le 8juillet2021afin de promouvoir la filière de géothermie de surface et minière et d’accompagner de nouvelles technologies et leurs usages. Vu le succès de l’appel, le Gouvernement a décidé la relance de l’opération en2022.De plus, le Gouvernement prévoit de lancer un appel de géothermie de profondeur afin de valoriser cette énergie dormante dans l’axe Sambre et Meuse.

En ce qui concerne l’hydrogène, un appel à projets a été publié en 2021 afin de lancer la filière hydrogène en Wallonie, tant en production qu’en consommation.Le Gouvernement wallon a ainsi décidé de retenir les quatre projets répondant aux critères de sélection sur les neuf projets reçus en réponse à l’appel. Tous les quatre comportent bien un volet de production d’hydrogène vert par l’électrolyse de l’eau et une utilisation de l’hydrogène dans le domaine des transports.Plus important encore, l’année 2022 est consacrée à l’élaboration d’un plan stratégique wallon pour l’hydrogène, qui reposera sur une analyse de la situation intégrant l’actualité.

On peut noter que la production d’hydrogène renouvelable reste actuellement beaucoup plus coûteuse que sa production par reformage du méthane. L’augmentation du prix de ce gaz et la diminution de sa disponibilité pourraient s’avérer constituer finalement des incitants en faveur du basculement vers l’hydrogène vert. Tous ces aspects seront assurément pris en compte dans l’élaboration du Plan stratégique wallon pour l’hydrogène. En conclusion, lors du Sommet de Versailles, les chefs d’État et de gouvernements européens ont demandé à la Commission de préparer son plan RePower EU pour le mois de mai.

Nous nous inscrivons dans les perspectives ouvertes de renforcement des politiques énergétiques wallonnes grâce à ce plan et nous l’utiliserons comme outil pour mettre en œuvre des actions concrètes sur notre territoire.

L’Union européenne suit de manière très active les événements qui se déroulent en Ukraine, et en particulier sur le volet de la sécurité d’approvisionnement énergétique. Comme je vous l’ai dit, la Commission a publié, le 8 mars dernier, une communication intitulée «REPowerEU: une action conjointe pour une énergie plus abordable, plus sûre et plus durable» qui a pour objectif annoncé de permettre à l’Union européenne de «faire face à tous les scénarios possibles» et de devenir indépendante du gaz russe avant la fin de la décennie et de répondre à la hausse des prix de l’énergie. La Commission rappelle également que le paquet Fitfor55 permettrait de diminuer la consommation de gaz de 30% à l’horizon2030. La Commission présentera, encore au mois de mai, des recommandations visant à accélérer les procédures d’octroi de permis dans le domaine des énergies renouvelables et, au mois de juin, une communication sur l’énergie solaire.

De plus, la Commission souhaite doubler le rythme annuel de déploiement des pompes à chaleur, à raison de10millions d’euros au cours des 5 prochaines années. De plus, lors du Sommet de Versailles, le Conseil européen a rappelé l’objectif de neutralité climatique pour 2050 et la nécessité d’assurer la sécurité de nos approvisionnements énergétiques en sortant de notre dépendance aux importations de gaz, pétrole et charbon russes dès que possible. À cette fin, la Commission est encouragée à mettre en place le plan RePower EU pour la fin du mois de mai. De plus, il a été demandé à la Commission de préparer, également pour la fin du mois de mai, un plan pour assurer la sécurité d’approvisionnement et des prix abordables de l’énergie pour l’hiver prochain. Enfin, sur la base de la communication de la Commission du 8 mars, d’autres options concrètes seront étudiées pour faire face à l’impact de la hausse des prix de l’énergie sur nos concitoyens et nos entreprises, en particulier les citoyens vulnérables et les PME, lors de la prochaine réunion du Conseil européen les 24 et 25 mars.

En tant que ministre régional de l’Énergie, je constate que plusieurs leviers pour résoudre le problème se trouvent dans nos mains. En effet, comme la Commission l’a rappelé, l’amélioration de l’efficacité énergétique, la réduction de la consommation et le déploiement des énergies renouvelables contribuent inévitablement à la réduction de notre dépendance aux énergies fossiles, quelle que soit leur origine.

Nous devons donc, au minimum, poursuivre les politiques et mesures mises en place et les renforcer si cela s’avère possible. Du côté du prix de l’énergie, les principaux leviers se trouvent aux mains de l’autorité fédérale, mais nous avons quand même, dès le mois de février, prolongé le statut de clients protégés conjoncturels.De manière générale, nous nous inscrivons dans la philosophie proposée par la Commission dans sa communication RePower EU. Les travaux commencent à peine, mais mes collaborateurs et mon administration suivent les travaux européens de près, en coordination avec les autres entités belges, afin de contribuer au plan européen et de mettre en œuvre des actions concrètes le plus rapidement possible.”

Je suis heureux de cette dynamique générale qui se met en place au niveau européen pour renforcer les énergies renouvelables comme leviers d’indépendance énergétique, et heureux que la Wallonie s’inscrive pleinement dans cette dynamique.

Les énergies renouvelables sont les seules dont le prix baisse sans cesse et qui nous rendent aussi énergétiquement indépendants. Ce sont les seules énergies qui sont de réelles énergies de paix.

C’est dommage qu’il ait fallu une guerre pour s’en rendre compte. Si tout cela pouvait au moins nous donner cet enseignement, ce serait au moins cette leçon que l’on pourrait en retirer.

M. le Ministre nous le confirme, on voit que la Wallonie est sur les rails et que les choses sont lancées et avancent. La pax eolienica avance de façon décisive, avec un atterrissage qui est prévu au mois de juin.

Le Ministre évoque le nouvel appel à projets en matière de géothermie, plus la géothermie de profondeur. Il y a des perspectives particulièrement intéressantes, aussi sur la filière hydrogène. Je ne reviens pas sur le marché de l’électricité et les communautés d’énergie, dont on aura l’occasion de discuter en profondeur également dans quelques semaines avec l’arrivée du décret consacré à ces enjeux.

Il y a toute une série de leviers dans nos mains. Il y a un momentum et il faut le saisir. C’est le moment ou jamais pour le faire !