Urgence des points de contact pour lutter contre le harcèlement dans l’enseignement supérieur

Les appels à l’aide témoignent de l’urgence à agir de manière concrète et systémique à l’échelle de l’ensemble de l’enseignement supérieur en Fédération Wallonie-Bruxelles. La grande enquête réalisée par la
Fédération des étudiant(e)s francophones (FEF), et publiée le jeudi 29 septembre dernier, le démontre également : un étudiant sur six se dit victime de harcèlement et 90 % des victimes n’osent pas porter plainte. Cette situation ne peut évidemment pas durer.

Le plan d’action défini dans notre résolution visant à prévenir et lutter contre le harcèlement des étudiantes et des étudiants dans les établissements d’enseignement supérieur de la Fédération Wallonie-Bruxelles, adoptée à la quasi-unanimité de notre Parlement il y a tout juste un an, offre de réelles réponses face à cette dure réalité. Il propose notamment l’adoption d’un cadre légal spécifique à l’enseignement supérieur, réclamé par l’ensemble des acteurs, qui doit définir des
procédures claires et faciliter le dépôt des signalements, à travers une cellule in dépendante à l’intérieur de chaque établissement, mais aussi au moyen d’un dispositif externe, à l’échelle de la Fédération.

Il est plus que nécessaire de mettre en œuvre ce plan. En effet, il faut pouvoir protéger les victimes et leur assurer un traitement égalitaire, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. La Ministre de l’Enseignement supérieur, Valérie Glatigny, a répondu à ma collègue Hélène Ryckmans, qui vous a interrogée à ce sujet lors de notre dernière réunion de commission, que l’enveloppe allouée à l’étude lancée sur le harcèlement dans l’enseignement supérieur était passée de 150 000 à 250 000 euros. C’est évidemment une excellente chose et je m’en réjouis. Cette étude scientifique représente le premier volet du plan d’action que nous avons adopté.

Les choses avancent donc, mais nous devons aussi progresser sur les autres volets de ce plan d’action et apporter des réponses, notamment aux plus petites structures telles que les écoles d’art et les hautes écoles qui sont particulièrement touchées par le harcèlement. Dans les écoles de cinéma, par exemple, les collectifs qui se font l’écho de ce problème parlent d’une situation particulièrement dramatique. Dès leurs études, les étudiants sont rebutés par le milieu professionnel, car ils et elles subissent des discriminations et des violences d’un autre temps.

D’où ces questions adressées à la Ministre Glatigny :

  • Madame la Ministre, comment réagissez-vous aux statistiques publiées par la FEF? Influencent-elles votre stratégie en la matière, et notamment le calendrier de réalisation de l’étude? Quels en sont les détails? Quand les résultats de cette étude seront-ils disponibles? Pouvez-vous fournir des précisions sur cette augmentation de 100 000 euros supplémentaires? À quoi sont-ils précisément dédiés?
  • Par ailleurs, vu l’urgence à agir à la suite des premières statistiques révélées par la FEF, quelles mesures complémentaires allez-vous prendre, en particulier pour mettre en œuvre la résolution de lutte contre le harcèlement dans l’enseignement supérieur? Quand l’évaluation de la circulaire «Prévention et lutte contre le harcèlement et les violences sexuelles au sein des établissements de l’enseignement supérieur et de promotion sociale», qui a été envoyée à tous les établissements le 13 septembre 2021, est-elle prévue?
  • Pouvez-vous faire un bilan de votre matinée d’information et d’échange avec les acteurs de référence qui s’est tenue le 28 septembre dernier? Quelles conclusions en ont été tirées? Quelles solutions concrètes, concertées, pouvez-vous dès à présent proposer?

Réponse de la Ministre :

“J’ai en effet connaissance d’un sondage réalisé par la FEF à ce sujet. Je suis par contre surprise d’apprendre que la FEF aurait lancé un nouveau sondage sur la question du harcèlement dans l’enseignement supérieur. Mon équipe a interrogé l’organisation le 5 octobre et attend sa réponse.

Le budget consacré à l’étude que nous sommes en train de réaliser est effectivement passé de 150 000 à 250 000 euros. Nous avions initialement prévu un budget de 150 000 euros pour l’étude et de 100 000 euros afin de valoriser la diffusion de la circulaire lancée lors de la rentrée académique 2021-2022. Après concertation avec différents acteurs constituant notamment le comité d’accompagnement de l’étude, nous avons préféré disposer de ce budget pour donner plus d’ampleur à l’étude et évaluer la mise en œuvre de la circulaire et des dispositifs créés pour y répondre, ce qui constitue le deuxième volet de l’étude. Ce volet intègre également la manière dont les établissements transposent en matière de lutte contre le harcèlement la loi du 28 février 2014 complétant la loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l’exécution de leur travail quant à la prévention des risques psychosociaux au travail dont, notamment, la violence et le harcèlement moral ou sexuel au travail (loi «Bien-être»). Les résultats de l’étude, tant pour le volet relatif à l’état des lieux des situations de violence que pour le volet consacré à l’évaluation de la circulaire et des dispositifs, sont planifiés pour décembre 2023.

En ce qui concerne la matinée d’information et d’échange du 28 septembre dernier avec les points de contact «harcèlement», les retours que nous avons eus jusqu’à présent sont très positifs. J’ai moi-même introduit cette matinée. Tous les établissements – universités, hautes écoles et écoles supérieures des arts (ESA) – étaient représentés par au moins une personne. Les principales conclusions que nous en avons tirées portent sur trois points.

D’abord, un grand nombre d’intervenants externes aux établissements sont présents sur le terrain: les services d’aide et d’accueil des victimes; SOS Viol, un partenaire agréé et subventionné par les maisons de justice qui a vu son budget renforcé; les maisons de justice; le dispositif légal de prévention et de soutien aux travailleurs; Unia, le Centre interfédéral pour l’égalité des chances; l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes (IEFH), etc. Ces intervenants collaborent entre eux, mais restent encore trop peu connus de nos établissements, tout comme les services qu’ils proposent. Il s’agit avant tout d’assurer un travail de réseau avec les établissements d’enseignement supérieur.

Ensuite, il est nécessaire d’informer les établissements sur ce qui existe, ce que nous avons fait durant cette journée. Enfin, les attentes vis-à-vis des résultats de l’étude sont importantes. Ils permettront de travailler en toute connaissance de cause à la création d’éventuels dispositifs complémentaires. L’ensemble des présentations effectuées lors de cette journée a été communiqué aux participantes et participants afin qu’ils puissent le diffuser au sein de leurs établissements.”

Je remercie la Ministre pour les précisions concernant l’étude : plus on lui donnera de l’ampleur, mieux ce sera. On ne peut toutefois pas attendre les résultats de cette étude pour avancer sur les autres volets. Il est possible d’agir dès à présent et c’est ce que tous les acteurs réclament.

La Ministre l’indique d’ailleurs elle-même, en mentionnant la volonté des acteurs d’avancer sur la mise en commun des bonnes pratiques. C’est un aspect important, qui faisait d’ailleurs partie du plan de lutte voté par notre parlement. 

Les acteurs réclament également un cadre légal et un point de contact interne à chaque établissement et externe, à l’échelle de la Fédération. On doit avancer là-dessus dès à présent, sans attendre. 

Quant aux CPVS, ils font partie de la solution. J’espère que Sarah Schlitz sera soutenue par tous les partis au Fédéral dans sa demande de nouveaux centres dans toutes les provinces, dont un en Brabant Wallon.