Changer la position de la FWB, au nom de l’exercice de la psychologie et de l’orthopédagogie cliniques

J’ai plusieurs fois interpellé la Ministre de l’Enseignement supérieur, Valérie Glatigny, au sujet de la situation des psychologues cliniciens francophones, situation qui, sincèrement, si elle n’était pas aussi grave, serait presque cocasse de ridicule. Je rappelle donc que les critères d’agrément pour les praticiens en psychologie clinique et en orthopédagogie clinique demandent la réalisation d’un stage de pratique professionnelle depuis un Arrêté Royal d’avril 2019.

Il y a deux ans, et encore l’année dernière, nous échangions avec la Ministre à propos de la difficulté pour les diplômés de réaliser ce stage en raison, notamment, d’un nombre de maîtres de stage insuffisant en Belgique. Deux fois le Ministre fédéral de la santé a dû postposer l’application de cet Arrêté Royal (les modalités pour cela ont été votées ce jeudi 8 juin en séance plénière de la Chambre). Mais ce n’est qu’une partie du problème.

En effet, qu’en est-il des professionnels déjà en exercice ? On compte des centaines et des centaines de personnes ainsi privées de ce sésame, ce fameux agrément, et contraintes de pratiquer dans l’illégalité pour ainsi dire. L’image renvoyée aux bénéficiaires est dramatique et délétère. C’est inadmissible.

J’ai cru comprendre qu’il y avait un dialogue constructif entre le cabinet de la Ministre Glatigny et celui du Ministre Vandenbroucke quant à l’interprétation de l’exemption de stage pour les professionnels déjà en exercice.

Pour sa part, il est sans équivoque (encore en commission santé le mardi 16 mai dernier) : selon lui, le stage n’est obligatoire que pour les personnes qui auront terminé leurs études en 2024 et après. Et donc : si on travaille comme psychologue avant septembre 2024, c’est qu’on a terminé ses études avant septembre 2024 et que, dès lors, forcément, on est dispensé des stages professionnels et qu’on peut obtenir son agrément.

Dans son allocution en commission, Monsieur le Ministre reprenait une partie de l’exposé des motifs et précisait que cela avait été expliqué à l’administration de la FWB et que les praticiens qui ont un parcours professionnel plus atypique ne peuvent être victimes d’une interprétation restrictive de la loi. Cela ne correspond en effet pas à l’esprit de la loi.

La Région flamande n’a pas ce problème vu qu’elle interprète apparemment correctement la loi. C’est la FWB qui refuse manifestement d’agir en bonne coordination. Tous les professionnels sont unanimes, la Commission d’Agrément en premier chef (c’est un comble quand même!) : il faut immédiatement régulariser ces professionnels de leur agrément et les sortir de cette situation.

D’où ces questions à la Ministre Glatigny :

  • Madame la Ministre, quels sont les arguments des services pour s’entêter dans ce refus, seuls contre tous, alors que le Ministre de la Santé a désormais clarifié parfaitement les choses ?
  • Compte-tenu des problèmes d’interprétation et de leurs conséquences, une circulaire semble aujourd’hui indispensable pour régler le problème. Peut-on espérer que vous en adressiez une tout bientôt ?

Réponse de la Ministre :

“L’autorité fédérale fixe les critères d’agrément des professionnels des soins de santé. Les Communautés sont responsables de leur application. Les articles 68-1 et 68-2 de la loi coordonnée du 10 mai 2015 relative à l’exercice des professions des soins de santé réglementent l’accès aux professions de psychologues cliniciens et d’orthopédagogues cliniciens. Ils précisent notamment les modalités relatives à l’exemption du stage professionnel en vue de l’agrément en tant que psychologue clinicien ou orthopédagogue clinicien.

Ces dispositions prévoient différentes catégories de personnes exemptées du stage. Sont concernés les psychologues cliniques et orthopédagogues cliniciens qui, au 1er septembre 2016, exerçaient déjà la psychologie clinique. Cela concerne aussi les étudiants qui ont entamé leurs études dans ces matières au 1er septembre 2016 ou au cours de l’année académique 2016-2017 au plus tard, quelle que soit l’année académique au cours de laquelle ils terminent avec fruit leurs études. Enfin, il est prévu que l’obligation de stage vise les étudiants qui terminent avec fruit leurs études en 2022-2023 ou au cours des années académiques suivantes. Cependant, le gouvernement fédéral a à nouveau reporté d’un an ce délai. Ces dispositions distinguent ainsi les étudiants qui ont commencé, ou qui terminent leurs cursus à une date donnée, des professionnels déjà en exercice.

Il n’est pas prévu, de manière générale, d’exempter de stage tous les praticiens qui auraient suivi une formation en psychologie ou orthopédagogie, éventuellement clinique, avant 2024. C’est donc à la lumière du libellé actuel de ces articles 68-1 et 68-2 de la loi de 2015 que mon administration a travaillé jusqu’à présent. Je prends toutefois acte de l’interprétation récemment donnée en commission de la Chambre par le ministre de la Santé publique et je ne manquerai pas de réexaminer la question en collaboration avec les services de mon administration.

Il est essentiel de préciser qu’il faut obtenir l’agrément et le visa avant d’exercer en tant que psychologue clinicien ou orthopédagogue clinicien, car ces professions sont réglementées depuis le 1er septembre 2016 et que l’agrément est devenu obligatoire le 1er janvier 2020. L’agrément précède donc l’exercice. Ce rappel important permet d’éviter des quiproquos aux conséquences dommageables pour les personnes qui décideraient de pratiquer sans agrément.

Enfin, vous avancez, Monsieur le Député, que plusieurs centaines de personnes sont actuellement privées d’un agrément. Il convient dès lors de clarifier le nombre de dossiers traités et les décisions favorables et défavorables. À ce jour, plus de 1 600 agréments de psychologues cliniciens ont été délivrés, contre 38 refus, soit seulement 2 % des dossiers. Ces décisions négatives se justifient au regard des critères d’agrément prévus à l’article 68-1 de la loi de 2015. Mon administration doit encore examiner 781 dossiers d’ici le quatrième trimestre 2023. Ces dossiers étant incomplets au niveau administratif, les demandeurs doivent fournir des documents complémentaires. Mes services veillent à résorber le retard de traitement constaté il y a plusieurs mois, notamment grâce à un équivalent temps plein (ETP) supplémentaire affecté au traitement de ces dossiers spécifiques. Quant à la situation des orthopédagogues cliniciens, tous les dossiers de demande d’agrément ont été traités. Chaque dossier a amené à un agrément.”

La situation de ces personnes est particulièrement compliquée. Nous pourrions débattre des chiffres qui me sont remontés du secteur, mais l’interprétation de l’administration de la Fédération Wallonie-Bruxelles est isolée depuis que le ministre fédéral de la Santé publique a clarifié les choses et que la Flandre est fidèle à l’esprit de la loi. Il est grand temps de
revoir cette position. J’entends l’ouverture de la Ministre et je me réjouis qu’elle soit déterminée à examiner cette question. J’espère que nous pourrons avancer dans ce dossier et trouver rapidement une solution à la situation de toutes ces personnes qui ne demandent qu’à exercer conformément à la réglementation.