Récemment, la presse se faisait l’écho de premières tendances d’inscriptions à nouveau en baisse dans les hautes écoles formant les futures infirmières et futurs infirmiers. C’est malheureusement une tendance lourde que l’on constate depuis plusieurs années maintenant.
Dans le même temps, dans le cadre des travaux budgétaires du gouvernement fédéral, le Ministre de la Santé a malheureusement annoncé le report de certains investissements, dont celui relatif au plan d’attractivité pour les infirmiers et infirmières, plan auquel le gouvernement de la FWB est attaché.
En sa qualité de Ministre de l’enseignement supérieur et des hôpitaux universitaires en FWB, Valérie Glatigny joue un rôle important pour faire valoir l’importance d’attirer et de garder davantage d’étudiants dans les cursus de soins et arts infirmiers et dans l’encadrement des étudiants stagiaires. On le sait, les stages sont souvent des moments difficiles d’adaptation (car parfois mal encadrés) et trop d’étudiants arrêtent en cours de cursus.
Un plan d’attractivité qui ne s’attacherait qu’aux études n’aurait dès lors pas de sens. On le sait, celui-ci doit également concerner l’entrée dans le milieu du travail, et de très nombreuses autres mesures qui ne relèvent pas de ses compétences.
En réponse à plusieurs questions de mes collègues en mai dernier, la Ministre indiquait que le comité de pilotage sur les questions de l’attractivité de la profession infirmière devait se réunir en juin.
D’où ces questions :
- Avez-vous des retours de cette réunion ?
- Quel suivi en faites-vous dans le cadre de vos compétences ? Avez-vous eu des retours du Ministre de la santé publique à propos des formations correspondant aux profils professionnels des différents niveaux du cadre européen de certification ? Un accord est-il en vue ?
- Le plan d’attractivité concerne bien sûr le fédéral pour ce qui concerne ses compétences et son budget, mais une partie de sa mise en œuvre concerne également les entités fédérées, dont la FWB. Dès lors, comment avancez-vous dans la mise en œuvre de ce plan dans le cadre de vos compétences en Fédération ?
- Enfin, pouvez-vous nous donner un premier bilan des inscriptions pour cette année académique dans les différentes filières des soins infirmiers et d’aide-soignante en FWB? Confirmez-vous une diminution des inscriptions ? La charte des stages est-elle bien d’application dans tous les établissements d’enseignement supérieur et établissements de soins partenaires qui accueillent les stagiaires afin de veiller à un stage de qualité ? Constatez-vous un impact positif ?
Réponse de la Ministre :
“Nous abordons régulièrement la question de l’attractivité du métier d’infirmier. En effet, les infirmiers constituent la catégorie la plus représentée parmi les professionnels de la santé, d’après un rapport de 2010 de l’Institute of Medicine (IOM), «The Future of Nursing: Leading Change, Advan-cing Health». D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 59% des pro-fessionnels de la santé sont des infirmiers.
Dans une perspective de santé publique, il est essentiel de s’intéresser à l’arrivée de nouveaux infirmiers sur le marché du travail. Cette préoccupation est pré-sente dès la formation initiale.
Depuis que le bachelier en soins infirmiers a été réformé, les chiffres communiqués par l’Académie de recherche et d’enseignement supérieur (ARES) montrent une baisse progressive du nombre d’étudiants inscrits en première année. Lors de l’année académique 2016-2017, année du passage des études à quatre ans, il y avait 3938inscrits en première année. En 2021-2022, il n’y avait plus que 2861inscrits. Nous ne disposons pas encore des chiffres de la rentrée académique 2022-2023.
Nous observons cependant une légère augmentation des inscriptions entre 2020-2021 et 2021-2022. Il y avait 2807inscrits en 2020-2021 et 2861inscrits en 2021-2022, soit une augmentation de 0,67%. La crise sanitaire ne semble donc pas avoir eu un impact négatif sur les inscriptions. Ce métier passionnant, qui allie l’humain et la technique, continue de susciter des vocations.
Par ailleurs, si nous regardons rétroactivement les chiffres sur une ligne du temps plus longue, nous constatons que le nombre d’inscriptions en première année en 2021-2022 est nettement supérieur à celui de l’année 2007-2008. Il y avait 2861inscrits en 2021-2022, contre 2518 en 2007-2008.
Je souhaite rappeler que la pénurie n’est pas liée à un manque d’offres de formation. Ces offres ne sont d’ailleurs pas contingentées. Notre pays ne manque pas non plus d’étudiants diplômés. La pénurie s’explique davantage, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises, par la désaffection, notamment due aux conditions de travail considérées comme particulièrement pénibles après l’entrée dans la profession. Ces conditions de travail ne relèvent pas de la Fédération Wallonie-Bruxelles. À titre d’exemple, en 2016, 202402personnes étaient habilitées à exercer le métier d’infirmier, mais seulement 124196 d’entre elles, dont 76172 en Communauté flamande et 48024 en Fédération Wallonie-Bruxelles, étaient actives dans le secteur des soins de santé.
Le récent rapport du Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE) appelle à instaurer au plus vite un plan pour les métiers infirmiers, et plus particulière-ment pour les soins intensifs, afin de les rendre plus attrayants.
Selon le rapport, ce plan doit comprendre, entre autres, une revalorisation salariale et une amélioration des conditions de travail, éléments qui ne relèvent pas de mes compétences.
Des réflexions sont en cours afin de revaloriser l’attractivité du métier d’infirmier. Pour la formation, la revalorisation passe par la modernisation du modèle de fonction pour les soins infirmiers du futur. À la suite des conclusions du groupe de travail de la task force et en concertation avec les entités fédérées, le ministre fédéral de la Santé entend modifier la loi relative à l’exercice des pro-fessions de soins de santé de 2005, afin de compléter le modèle de fonction infirmier en y ajoutant deux profils. Cela devrait contribuer à rendre le secteur beaucoup plus attractif, ce qui représente une priorité pour nous tous.
Les conditions spécifiques de ces nouveaux profils concernant l’autorisation d’exercer, les exigences minimales de qualification et la collaboration avec d’autres professionnels de la santé doivent être précisées par les organes d’avis infirmiers, le Conseil fédéral de l’art infirmier (CFAI) et la Commission technique de l’art infirmier. L’élaboration d’un plan d’attractivité et de rétention de la profession infirmière est désormais une priorité de la conférence interministérielle Santé publique (CIM Santé publique).
D’après les retours d’information qui me parviennent des directions des départements infirmiers des hautes écoles, la convention-cadre de stage entre l’établissement d’enseignement supérieur et l’institution d’accueil est utilisée et appréciée. À ce jour, aucun problème ne m’a été communiqué à cet égard, sans doute parce que le contenu de la convention a été élaboré en concertation étroite avec des représentants des hautes écoles et des directions des établissements de santé.
Comme je l’ai déjà indiqué en réponse à l’une de vos précédentes questions sur le sujet, les établissements ont coutume d’organiser, en fin d’année, des réunions d’évaluation avec les acteurs des lieux de stages. Lesdites réunions ont été l’occasion d’avoir un retour d’information positif. Elles ont aussi pour but d’analyser l’encadrement des stages et, le cas échéant, d’y apporter des améliorations.
En outre, à ma demande, l’ARES procède actuellement à une évaluation con-cernant l’utilisation de cette convention.”
Ce travail sur l’attractivité est fondamental après la période difficile que nous venons de vivre. Tous les moyens dégagés pour financer le secteur ne serviront à rien si nous n’avons pas les bras pour le faire fonctionner. Il faut donc mettre les bouchées doubles.
Les chiffres pour cette année ne sont pas encore tous disponibles, je les redemanderai donc dans quelques semaines. Cependant, la Ministre confirme la tendance à la baisse des inscriptions depuis le passage de la durée des études à quatre ans, et ce, malgré la légère augmentation enregistrée l’année passée. La presse s’est fait l’écho d’une nouvelle baisse pour cette année, je compte donc sur elle pour faire progresser le dossier, même si de premières avancées ont été enregistrées, concernant notamment la convention de stage.
La question est aussi de permettre le maintien au travail à travers une amélioration des conditions de celui-ci. Un enjeu important qu’elle a évoqué est celui des nouveaux profils. La question du brevet devra aussi être réglée, même si elle relève de différents niveaux de compétences. J’espère que la réflexion en la matière pourra aboutir prochainement.