Les nombreux retours de terrain des étudiants en soins infirmiers témoignent une fois de plus des conditions pénibles dans lesquels nombre d’entre eux réalisent leur stage.
Lors de notre dernier échange à ce sujet, la Ministre de l’Enseignement supérieur, Valérie Glatigny, faisait référence à la convention-cadre tripartite qui lie les établissements, les lieux de stage et les étudiants, à propos de laquelle vous attendez un rapport prochainement. L’ARES vient de vous remettre ce rapport suite à sa séance du 30 mars dernier.
Elle conclut de manière globalement positive pour ce qui concerne l’uniformisation des conventions dans les grandes institutions, mais pas dans les petites institutions. Et puis surtout, elle indique que cela n’améliore pas le bien-être des étudiants en stage, en raison du manque de financement dédié à l’accompagnement des étudiants par les professionnels de terrain, de la charge de travail trop importante pour les étudiants et du manque d’implication des institutions partenaires.
D’où ces nouvelles questions à la Ministre Glatigny :
- Quelles leçons tirez-vous de cette évaluation ?
- Quelles mesures envisagez-vous de prendre pour remédier au manque d’efficacité de la convention sur le bien-être des étudiants ?
- Par ailleurs, en cas de non-respect de la convention-cadre, à l’heure actuelle, quelles démarches peuvent entreprendre les étudiants afin de signaler ces manquements ? Des procédures clairemement définies sont-elles en place afin de recevoir les plaintes des étudiants ? Si ce n’est pas le cas, des initiatives en la matière sont-elles à l’étude au vu de la situation ?
- Vous indiquiez également qu’un infirmier chargé de l’accueil des nouveaux engagés (ICANE) effectue l’évaluation des lieux de stage à présent. Pourrait-on envisager que l’ICANE soit également un référent pour les étudiants en cas de plainte ?
- Enfin, vous vous êtes montrées favorable à l’idée de porter la question à la CIM Santé. Quelles démarches avez-vous entreprises dans ce cadre depuis lors ?
Réponse de la Ministre :
“Monsieur le Député, je partage vos préoccupations relatives au bon déroulement des stages en soins infirmiers. Les stages sont des situations d’apprentissage par excellence, des moments privilégiés pour l’étudiant lui permettent de mieux appréhender la réalité de sa formation. Dans ce cadre, l’étudiant est considéré dans sa singularité. En effet, les cursus en soins infirmiers comptent 4 600 heures, parmi lesquelles 2 300 sont consacrées à la formation pratique. La moitié du temps de formation se passe donc en stage au sein de diverses institutions.
En vue de favoriser le bon déroulement des stages, la Fédération Wallonie-Bruxelles a modifié, par décret du 19 juillet 2021 portant diverses dispositions en matière d’Enseignement supérieur, d’Enseignement de promotion sociale, de Recherche scientifique et d’Hôpitaux universitaires, l’article 20 du décret du 18 juillet 2008 fixant des conditions d’obtention des diplômes de bachelier sage-femme et de bachelier infirmier responsable de soins généraux, renforçant la mobilité étudiante et portant diverses mesures en matière d’enseignement supérieur. L’objectif était d’établir les balises d’une convention-cadre de stage en fixant les éléments minimaux que celle-ci devait contenir, parmi lesquels les engagements respectifs de l’institution d’accueil et de l’établissement; les modalités relatives à l’encadrement pédagogique; le rôle du référent dans l’institution d’accueil et le rôle de l’enseignement référent; ainsi que les horaires.
Afin de garantir aux stagiaires le statut d’étudiant, de veiller à leur intégration et au bien-être, un modèle de convention-cadre a été élaboré par l’ARES. Dès le 20 juillet 2021, les établissements ont été invités à utiliser ce modèle repris dans la circulaire 8199 tant pour les bacheliers sage-femme et infirmier responsable de soins généraux que pour l’ensemble des formations paramédicales.
J’ai interrogé l’ARES à propos de l’évaluation de la convention-cadre de stage, sur son utilisation et les éventuelles modifications à y apporter. Je viens de recevoir cette évaluation, reste à l’analyser. Selon une enquête menée par la commission paramédicale de l’ARES auprès des établissements, l’utilisation de la convention-cadre est globalement positive pour les stages de sage-femme et soins infirmiers qui se déroulent dans des institutions partenaires de grande taille.
Néanmoins, les engagements de l’institution d’accueil ne sont pas toujours respectés pour différentes raisons. En effet, les infirmiers référents ne disposent pas toujours de temps à consacrer à l’encadrement des étudiants. Face à la surcharge de travail, ils doivent choisir entre soigner ou encadrer. En outre, les infirmiers manquent d’outils pédagogiques pour encadrer les stagiaires. L’ICANE reste l’interlocuteur privilégié des étudiants, car il assure la qualité de leurs milieux d ’accueil, mais il n’est pas seul. La gestion d’équipe du chef infirmier est aussi essentielle pour reconnaître une place à l’étudiant.
Comme cette question concerne les ministres de la Santé, j’ai demandé que ce point soit inscrit à l’ordre du jour de la CIM Santé. Il m’a été répondu que, conformément à la procédure habituelle, il y aura d’abord une discussion dans un groupe de travail intercabinets «professions de santé» avant la discussion en CIM Santé. Nous reviendrons sur cette question après cette réunion intercabinets.”
Je me réjouis que la Ministre ait entrepris les premières démarches qui déboucheront sur l’organisation d’une CIM Santé à ce sujet. Nous serons attentifs à l’évolution de ce dossier. J’ai lu les premiers éléments de l’avis de l’ARES relatifs à cette convention-cadre. La question du temps est fondamentale, de même que la nécessité de réduire la charge de travail des stagiaires et encadrants. L’encadrement sur place dans les lieux de stage est essentiel et il convient donc de mieux former les infirmiers encadrants, mais aussi de leur permettre de dégager du temps pour accompagner les stagiaires durant leur formation. De même, renforcer l’encadrement au sein des établissements, c’est leur permettre de dégager du temps dédié à l’accompagnement des étudiants en stage. Certaines pistes de solution sont indispensables et j’espère que ces discussions en CIM permettront d’avancer dans cette direction.